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Assises territoriales de l’islam : quelles sont les attentes des acteurs de terrain ? 1/6

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Le ministère de l’Intérieur a lancé ses Assises territoriales de l’islam de France jusqu’au 15 septembre. Un processus de consultation des ministres du culte musulman organisé au niveau départemental par les préfectures et qui devra permettre d’aborder « les thèmes de la représentation institutionnelle de l’islam de France, de la gouvernance des lieux de culte, du financement du culte et de la formation des ministres du culte ». Dans un dossier d’entretiens publiés en 6 volets, Mizane.info a donné la parole à des acteurs de terrain, imams, cadres associatifs, responsables religieux et universitaires pour savoir ce qu’ils pensent de cette consultation et du processus d’institutionnalisation de l’islam en France. Des avis tranchés et des propositions ont été formulés aussi bien sur les besoins institutionnels que sur la réforme du CFCM ou le rôle de l’Etat. Dans ce premier volet, Fouad Saanadi, président du Conseil régional du culte musulman Aquitaine et membre fondateur du Centre d’action et de prévention contre la radicalisation des individus (CAPRI) expose ses vues sur la consultation du gouvernement et son travail local dans la région Aquitaine.

« Nous avions formulé avec Tareq Oubrou cette idée d’une réforme qui parte des territoires. Beaucoup de questions restent en suspens. Le gouvernement organise ces assises territoriales de l’islam de France. De quoi parle-t-on exactement ? Est-ce d’une réforme du culte ou de la culture ? Pour notre part, sur le territoire bordelais, nous faisons déjà la promotion d’une certaine lecture de l’islam qui pourrait convenir à une réforme qui ne soit pas seulement administrative. Si le but de cette consultation n’est pas d’aboutir à une réforme, cela n’aura pas beaucoup de sens. Le but doit être de réorganiser l’islam, de le structurer. L’islam est régulièrement pris en tenaille entre des islams consulaires et des mouvements religieux. La question est donc de quel islam parle-t-on ? Nous attendons de la part de l’Etat un accompagnement distancié vis-à-vis de cette organisation du culte musulman. C’est une bonne chose que ces assises partent des territoires, ce qui n’était pas le cas jusqu’à maintenant. Cela apportera plus de représentation et de diversité. Nous aurons ainsi une émergence de demandes qui iront au-delà des conflits traditionnels entre fédérations qui ont jusqu’à présent pris en otage le sujet. Le quotidien d’une association musulmane est néanmoins très éloigné de ce type de conflit.

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Fouad Saanadi.

Des questions comme le financement du culte, la formation des imams ainsi que toutes les mesures pour prévenir les discours radicaux vont pouvoir être discutées. Mais il faut dire que la tension ambiante et le fait que l’islam n’ait pas bonne presse ne font pas les affaires de l’islam local, ne serait-ce que les petites mosquées qui essaient de s’agrandir, et les musulmans qui essaient d’avoir un lieu de culte décent. Il est très difficile, dans ce contexte, de négocier avec les élus locaux cette question de la visibilité publique de l’islam.

Formation des imams et financement

Nous travaillons avec Tareq Oubrou sur un projet de formation des imams depuis trois ans. Une formation continue, en cours d’expérimentation, qui intègre les questions géopolitiques et défend une théologie préventive. Nos imams qui ont souvent déjà obtenu une première formation par exemple à Château-Chinon n’ont pas un parcours professionnel qui leur permettent d’être imam à plein temps.

Les mosquées ont un rôle à jouer dans le discours et la vision de l’islam qu’elles proposent et dans l’équilibre mental des fidèles

Beaucoup se verraient imam-aumôniers pour obtenir une rémunération qui leur permettent d’exercer. Cette question du statut de l’imam est centrale mais elle n’a toujours pas été réglée. La question du financement et du lien entre culte et culture se posent également, tout comme la question du halal à régler une fois pour toutes. Dans notre accès aux subventions publiques, nous devons reconnaître que nous sommes pénalisés par notre casquette musulmane contrairement aux associations chrétiennes et juives qui s’en sortent très bien dans leur montage financier. La plupart du temps, on nous répond qu’il n’y a pas plus de budget disponible. Mais en vérité, nous ne sommes pas les bienvenus sur le terrain du social.

La résolution du financement passe par un montage entre financement public et privé. Cela signifie avoir accès au financement de l’aumônerie. Il faudrait réfléchir à un package qui englobe les fonctions d’imam et d’aumônier à plein temps avec un créneau horaire à la mosquée, un autre dans les prisons et un autre dans les hôpitaux. Pour le financement privé, il y a les dons. Les musulmans sont généreux et les mosquées fonctionnent jusqu’à présent grâce aux dons. Les protestants fonctionnent de cette manière en cumulant aumônerie et diaconat, le service social protestant. Plusieurs montages permettent d’éviter de toucher à l’équilibre laïc.

En matière de prévention générale contre l’extrémisme, nous sommes par contre loin derrière en termes de propositions. Les mosquées ont un rôle à jouer dans le discours et la vision de l’islam qu’elles proposent et dans l’équilibre mental des fidèles. Les discours ne sont ni formulés dans un français correct, ni en phase ni avec les réalités contextuelles ou avec la modernité. Il y a par conséquent un gros retard à rattraper sur cette question. »

Fouad Saanadi

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