A l’occasion de l’hommage que les éditions Albouraq, en partenariat avec Mizane Info et Mizane TV, ont consacré samedi 30 septembre, à la mémoire, la vie et l’œuvre de Maurice Gloton, mort le 28 janvier 2017 à l’âge de 90 ans, Slimane Rezki revient brièvement dans cet article que nous publions en exclusivité sur la rencontre de celui qui fut surnommé « l’homme du Coran » avec les cercles guénoniens français dès les années 1950, une période méconnue de l’histoire. Slimane Rezki est diplômé en Sciences religieuses de l’École Pratique des Hautes Études de Paris, auteur, traducteur, conférencier, spécialiste du soufisme et particulièrement de l’œuvre de René Guénon.
Maurice Gloton s’est convertit à l’islam en 1950. Son père, Edmond Gloton, franc-maçon, était déjà un féru des lectures ésotériques. C’est par son biais qu’il découvre l’œuvre magistrale de René Guénon qui, dès 1909, publie des écrits d’une portée toute nouvelle qui vont bouleverser les nombreux lecteurs à la recherche d’une véritable spiritualité. C’est en entrant en contact avec certains de ces lecteurs assidus de l’œuvre de Guénon que Maurice Gloton va rencontrer Michel Vâlsan. Ce dernier, d’origine roumaine, s’était converti à l’islam depuis quelques années et s’était rattaché à la tariqa dirigée par Frithjof Schuon, située en Suisse. Le soufisme constituait la suite naturelle de la forme islamique de l’œuvre de René Guénon qui lui-même était musulman depuis 1910 et rattaché à une voie soufie égyptienne, la Shadiliyyah. D’abord située en Suisse, à Lausanne et Bâle, la tariqa s’étend en France, d’abord à Amiens, puis à Paris. M. Gloton fréquentera le groupe de Paris sous la direction de Michel Vâlsan qui, en tant que maître spirituel, guidera de nombreux disciples occidentaux tels Michel Chodkiewicz, Charles-Adré Gilis, Denis Gril et bien d’autres. C’est dans ce cadre que Maurice Gloton va être formé à l’approche des textes soufis et notamment à l’étude de l’œuvre de celui qui est considéré par beaucoup comme le plus grand des maîtres soufis, Ibn ‘Arabi.
Une contribution décisive pour l’islam de France
C’est ainsi que pendant plus de quarante ans, Maurice Gloton va publier une suite d’ouvrages permettant de comprendre que la sagesse de l’islam est d’ordre universel et métaphysique. Mais plus encore, et en écho à l’œuvre de René Guénon, ses travaux tendront à démontrer que plusieurs lectures du Coran sont possibles comme l’indiquent de nombreux hadiths du Prophète, mais surtout que le Livre sacré de l’islam et l’exemple du Prophète sont source d’un enseignement initiatique toujours vivant. Ce qui sera la cause de nombreuses conversions d’occidentaux en quête d’une réalisation spirituelle. Ces écrits, ainsi que ceux de ses condisciples, seront les premiers à tracer une voie poursuivie par ses continuateurs actuels qui ont aussi pris conscience que le patrimoine spirituel et intellectuel de l’islam reste encore à explorer.
L’émergence de ce courant, à l‘origine de nombreuses traductions, a la particularité d’être l’expression d’auteurs musulmans et honnêtes ; je m’explique, les orientalistes des siècles précédents ont traduit certaines œuvres du patrimoine islamique à l’aune de leurs connaissances chrétiennes et donc en se basant sur une terminologie inadaptée, mais surtout à une époque où l’esprit dominant de l’intelligentsia d’alors était sous la coupe de pouvoirs impérialistes et colonialistes dont les intentions belliqueuses n’étaient pas cachées. L’œuvre de ces pionniers est appelée à être continuée par les forces vives des musulmans actuels conscients de l’enjeu et de la portée de ces travaux inédits.
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