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Comment faire face à l’épreuve ?

Dans cette nouvelle chronique publiée par Mizane.info, le théologien et essayiste Mohamed Bajrafil aborde la douloureuse question de l’épreuve et du malheur qui peuvent nous frapper en tant qu’individu. Comment les surmonter dignement ? Pour Mohamed Bajrafil, la conscience du bien présent et la reconnaissance du don divin sont les moyens de relativiser notre souffrance et de la dépasser.

Comment vivre une épreuve ?

L’équation aux multiples degrés qui, par conséquent, n’a pas une mais une myriade de réponses selon les temps, les lieux, les personnes, etc. Les constantes restent, en revanche, deux : l’épreuve et sa victime. Toujours deux. On est toujours seul face à l’épreuve, quand bien même on vit la même chose, car on ne ressent jamais les choses de la même manière, que l’on soit frère, femme, mari, enfant, parent, ami. Nous ne ressentons jamais les choses pareillement. C’est pourquoi les paraboles religieuses nous enseignent à toujours essayer de traiter l’autre comme nous souhaitons être traités. Pas comme l’autre souhaite être traité car cela nul le sait. À part son Créateur, pour ceux qui sont croyants.

Mais revenons à l’épreuve. Comment survivre à son enfant ? À ses parents ? À ses amis ? À ses ennemis ? Comment faire face à une maladie qui s’abat brusquement sur nous, sur un proche ? Comment faire ? Que faire ? Je serais présomptueux si je prétendais disposer de La réponse. Ce dont je peux être certain, c’est qu’on sent la terre se dérober sous nos pieds et on a besoin d’une béquille, d’une oreille, peut-être, ou de silence. On est sonnés et on a besoin d’un réveil, d’une étincelle de vie.

Ces lignes me sont dictées par moult situations que des frères, des sœurs, des amis, en Dieu ou en humanité, et moi-même vivons depuis enfants. J’ai personnellement perdu ma mère, enfant, et un fils qui aurait aujourd’hui la moitié de mon âge, un ami très proche, Hilal, des tantes, des oncles, auxquels je pense tout le temps. Une personne proche me dit souvent à ce sujet : Ces pertes sont autant de blessures que l’on aura toujours sur nous, qui se mettent à saigner de temps en temps, lorsque le désir de voir chacune d’elle se manifeste.

Mon frère, ma sœur, qui vis une épreuve, ne crois jamais qu’un malheur, si grand soit-il, signifie la fin du monde. Le monde continue toujours. Il suffit, j’allais dire simplement, de regarder ton passé pour t’en apercevoir. Avant de savoir marcher, on a eu des bobos, avant de réussir, quelque chose, on vit des difficultés. Ce sont là des platitudes que l’on peut lire partout. Mais, parfois, l’évidence n’est pas évidente car on y est trop habitué.

Aussi faut-il savoir regarder combien la vie nous a gâtés. Si à 40 ans, on nous annonce un cancer, une maladie grave, la perte d’un être cher, la faillite de notre entreprise, la trahison de notre conjoint, une rupture de mariage, etc., sachons nous rappeler les bons moments qu’on a passés avant. Ne soyons pas ingrats. 40 ans de bonne santé, c’est quelque chose, les amis. Mais, pour s’en rendre compte, il faut regarder celui ou celle qui est né(e) malade, qui n’a jamais connu la santé, ou celui ou celle qui n’a jamais eu la vue, etc. Là, on s’aperçoit qu’on est loin d’être le plus malheureux des hommes, car il y a toujours pire que soi. « Qui croit que personne ne vit ce qu’il vit pèche », dit un adage comorien.

Vivre en couple, c’est comme vivre en société. Des fois, on a des problèmes, des fois, on n’en a pas. Mais, quand on n’en a pas, c’est juste une impression. Ils sont toujours là. Il faut savoir les ignorer des fois, sous peine de devenir malade. Mais nous vivons souvent ainsi. Le résultat en est qu’on n’a confiance en personne, on soupçonne tout le monde. Au final, c’est nous mêmes qui devenons malades des autres.

Apprenons à regarder le meilleur, sans être naïfs non plus. Mais, magnifions les meilleurs moments passés entre nous, dans un couple, une fratrie, une bande d’amis. Soyons reconnaissants de la moindre chose, du moindre service que chacun a pu nous rendre. Dans les relations humaines, la principale cause des ruptures, c’est l’ingratitude. Si chaque fois qu’on voulait en découdre avec quelqu’un on réalisait combien un jour, un moment il nous a été utile, on se retiendrait et, au mieux, on l’aimerait, au pire on ne lui ferait pas de mal.

Mais, on est égoïste. Prenons-y garde. Sachons être reconnaissants dans et de tout, nous vivrons mieux avec nos blessures. C’est léger comme pensée, vous me direz. Mais, pourquoi philosopher outre mesure sur des choses qui bien inextricables a priori sont si banales? Pour exorciser leurs peurs, les mondes anciens ont inventé les contes. À chacun de nous d’écrire un conte, son conte, à chaque instant, sous peine de vivre un enfer permanent. Il faut savoir rêver, pour mieux plonger dans la réalité. Regardez les artistes ! Pour mieux nous parler, ils vont dans leur imagination. C’est leur conte, qui rend compte de leurs vies, qui nous émeut, nous attire ou nous intrigue. Devenons conteurs de nos vies et non compteurs de nos humeurs.

Humainement vôtre.

Mohamed Bajrafil 

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