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Hijab/Tik Tok : le Conseil des mosquées du Rhône sous le feu des critiques

La prise de position critique du Conseil des mosquées du Rhône sur des vidéos Tik Tok de jeunes hijabeuses a soulevé une pluie de critiques contre les responsables lyonnais. Un mécontentement aggravé par l’annonce concomitante de l’annulation d’une expo sur la vie du Prophète prévu à l’IFCM les 8 et 9 octobre à l’occasion du Mawlid. Contactés par Mizane.info, les protagonistes de cette nouvelle polémique ont expliqué leur position. Décryptage.

Le temps se gâte pour le Conseil des mosquées du Rhône. Présidé par Kamel Kabtane, recteur de la Grande mosquée de Lyon, le CMR qui fédère plusieurs mosquées du Rhône a publié récemment un communiqué réagissant à une nouvelle tendance sur Tik Tok. Des jeunes hijabeuses publiant des vidéos sur le voile et l’école dans un style jeune, branché et non conformiste. De quoi provoquer le mécontentement des responsables du CMR.

« Devant ce qui apparaît être des manifestations d’une frange très minoritaire de la jeunesse française musulmane à vouloir s’opposer aux règles et à la loi, le CMR dénonce des comportements provocateurs et irresponsables. »

Mosquées du Rhône : les raisons d’une polémique

Le pavé est lancé dans la mare. Et les réactions ne se sont pas fait attendre. Imams, acteurs associatifs, simples fidèles, de toutes parts les critiques affluent.

Contacté par Mizane.info, Kamel Kabtane explique la décision prise par son bureau.

Pour le président du Conseil des mosquées du Rhône, il était essentiel de se positionner dans un contexte où chaque micro-évènement est potentiellement exploité par les chaînes d’information en continu.

« Ce communiqué n’a pas été rédigé à la légère, le bureau du CMR s’est réuni. Il était important de protéger la communauté musulmane dans un contexte où la moindre petite affaire devient nationale. Notre communiqué vise ceux et celles qui, dans les écoles, créent le buzz sur Tik Tok. Nous considérons les comportements de ces jeunes comme de la provocation. Ce ne sont pas des réactions responsables de personnes responsables. »

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Mais ajoute M. Kabtane, ce communiqué n’a pas été rédigé « contre les femmes qui portent le voile ni contre la communauté musulmane », mais « pour éviter qu’elle ne soit une nouvelle fois montrée du doigt. »

Mosquées du Rhône : « Nous ne sommes pas des supplétifs du gouvernement »

« Le Conseil des mosquées du Rhône, dit-il, a toujours pris ses responsabilités quand il le fallait, alors que beaucoup d’autres restaient silencieux. Nous l’avons montré récemment dans l’affaire Iquioussen où nous avons pris position et pris des coups. Nous ne sommes pas des supplétifs du gouvernement », précise le président du Conseil des Mosquées du Rhône.

Il s’agit seulement, réitère-t-il, de dénoncer « l’utilisation identitaire de vidéos faites dans un contexte dominé par le sentiment de rejet en France ». « Nous ne sommes pas non plus contre les jeunes, ou contre le voile. Nous l’avons souligné, c’est un phénomène qui à chaque époque touche toutes sortes de jeunes. »

Kamel Kabtane.

Kamel Kabtane reconnait par ailleurs des dérives et des abus dans la réception sociale de certaines tenues portées par des jeunes femmes comme les jupes longues, devenues islamiques dans le vocabulaire médiatique. « Je suis d’accord sur l’existence de ces abus et je suis prêt à me battre contre ces dérives. La question du hijab ne date pas d’hier, bien avant 2004 et nous nous sommes toujours mobilisés à chaque fois qu’il le fallait. Qu’on cesse cette stigmatisation à tout va sur les habits, l’alimentation. »

Une expo sur le Prophète annulée à l’IFCM

Une polémique n’arrivant jamais seule, le recteur de la Grande mosquée de Lyon, également responsable de l’Institut Français de Civilisation Musulmane dont les bâtiments sont situés à quelques mètres du lieu de culte, a dû aussi répondre à un autre mécontentement.

Une exposition sur la vie du Prophète de l’islam, présentée par l’Institut Sira, était programmée à l’IFCM les 8 et 9 octobre à l’occasion des célébrations du Mawlid, la naissance du Prophète.

Or, apprenait-on hier, l’exposition a été annulée. Pour quelles raisons ?

« Cette exposition, commente M. Kabtane, n’était pas de nature à refléter ce sujet tel qu’on pouvait l’attendre de l’Institut français de civilisation musulmane. Des images satellitaires sans explications, une présentation qui ne correspondait pas du tout à ce que l’on souhaitait, des ratures, des fautes d’orthographes. Quand vous présentez une exposition, il faut qu’elle soit digne. »

Questionné sur cette annulation subite et sur le fait que l’IFCM avait promu l’évènement, Kamel Kabtane reconnait que son staff a bien vu l’expo avant programmation et que cette décision a été prise de son chef.

« Une personne de notre équipe l’avait vu auparavant. Nous lui avions fait confiance. Mais lorsque je l’ai vu, je n’ai effectivement pas souhaité qu’elle soit présentée à l’IFCM. Nous attendions une belle exposition qui soit à la hauteur de ce qu’était le Prophète, sur lui la paix. »    

Institut Sira : « Jusqu’à présent, nous n’avons reçu aucune réponse officielle »

Du côté des membres de l’Institut Sira et de sa direction, joints par Mizane.info, on a une autre version des évènements.

Tout commence il y a un an. L’institut Sira est invité à présenter son exposition sur le Prophète à la mosquée du Cher. Selon les organisateurs, l’évènement a été un succès. Il se trouve que l’un des membres de l’assistance est le responsable événementiel au sein de l’IFCM, Hafid Sekhri. « Il nous a demandé avec insistance de présenter l’exposition à l’IFCM », confie l’un des membres de l’équipe de l’Institut Sira à la rédaction de Mizane.info.

Les organisateurs réclament une demande officielle par courrier électronique. Ce qui est fait. Les détails financiers et organisationnels de l’exposition sont abordés. Un document de l’IFCM sur les droits-photos est même adressé à l’Institut Sira. Le service communication de l’IFCM prend ensuite la relève et adresse un message aux organisateurs le 27 juillet. « La chargée de communication de l’IFCM nous a demandé de lui adresser des éléments photos et historiques de l’exposition pour assurer la communication d’un évènement que l’IFCM s’annonce « très fier » de recevoir, selon les termes employés. »

Dimanche dernier, un rendez-vous est pris pour monter l’exposition dans les locaux. L’IFCM communique officiellement pour annoncer l’évènement. Tout semble aller pour le mieux pour les 8 et 9 octobre, date prévue de l’exposition.

Jusqu’à ce mardi 4 octobre où l’un des proches de la direction de l’Institut Sira leur apprend que l’évènement est annulé et que l’annonce de cette annulation a été faite sur les réseaux sociaux. « On a eu du mal à y croire car tout le matériel était entreposé là-bas et que nous n’avions pas été prévenus. Jusqu’à présent, nous n’avons reçu aucune réponse officielle. »

Pas de boycott sur l’affiche !

Que s’est-il passé ? Kamel Kabtane a bien posé son véto contre l’exposition, selon les organisateurs qui se réfèrent à leur rencontre avec lui au moment où ils ont monté les éléments de l’exposition sur place.

« Kabtane est arrivé, il n’avait pas l’air très content. Il a regardé les cartes et nous a dit : « là, il y a une faute de français ». Nous avions justement mis du scotch pour masquer cette petite faute discrète. Une autre carte a attiré son attention, celle où nous parlions du boycott qui a frappé les Banu Hashim (tribu d’où est issu le Prophète de l’islam, ndlr) à La Mecque. Agacé, il nous a dit : « comment ça boycott, il n’y a pas eu de boycott ! » Et là, nous lui avons dit : si, il y a eu boycott, éléments à l’appui. Kamel Kabtane ne voulait pas de ce mot sur l’affiche. « Il y aura des juifs et des chrétiens à cette exposition, ils vont se sentir attaqués », nous a-t-il dit. Nous lui avons répondu que non, et que la notion générale de boycott n’avait rien à voir avec les juifs et les chrétiens. Il nous a malgré tout demandé de changer l’affiche 6 jours avant l’ouverture de l’expo. Ce n’était pas possible avec aussi peu de temps. Mécontent, il est parti. »

Shakeel Siddiq.

Contacté par Mizane.info, Shakeel Siddiq, le président de l’Institut Sira a également réagi à cette annulation. « Nous n’avons rien contre Kamel Kabtane, nous ne souscrivons pas aux thèses complotistes sur les raisons de cette annulation et d’ailleurs nous n’avons reçu aucune réponse officielle pour comprendre cette décision, explique-t-il. Simplement nous ne travaillerons plus avec lui car on ne peut pas lâcher des organisateurs au dernier moment sans raison valable et prétexter comme on a pu le lire sur les réseaux sociaux, un manque de qualité historique de notre travail. Ce n’est pas correct. »

Les Lyonnais privés d’évènement pour le mawlid

Shakeel Siddiq a aussi souligné à quel point cette exposition était destinée au grand public.

« Notre travail n’est pas réservé aux seuls musulmans, il est grand public et ouvert à tous. Nous avons déjà présenté cette exposition de nombreuses fois, une fois même en présence d’un préfet. Tout s’est toujours bien passé. Des personnes de l’IFCM ont vu les éléments de l’expo et avait toutes les garanties. »

Pour le président de l’Institut Sira, il s’agit surtout d’un grand gâchis dommageable pour le public lyonnais, qui se voit privé d’évènement pour le Mawlid.

« Ce qui nous dérange le plus, précise M. Siddiq, est qu’on aurait pu faire une autre exposition ailleurs puisque nous sommes régulièrement sollicités à l’occasion du Mawlid. Nous avons dû refuser 4 à 5 propositions pour privilégier celui de l’IFCM. Des invités de Suisse et du Danemark avaient même réservés leurs billets d’avion et leurs hôtels », commente-t-il.   

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