En s’appuyant sur quelques versets de la sourate 56 du Coran, intitulée « Al-Waqi’a » (L’Événement), Rachid Hamimaz aborde la question de la démesure humaine qui confine à l’idolâtrie de ceux qui se prennent pour Dieu. Extraits d’une chronique à lire sur Mizane.info.
La sourate 56 du Coran, intitulée « Al-Waqi’a » (L’Événement), aborde les thèmes de la résurrection et du Jugement dernier, et répartit l’humanité en trois groupes distincts dans l’au-delà : les rapprochés de Dieu, les gens de la droite, et les gens de la gauche.
Cette sourate explore également la création de l’homme, la nature, et les signes terrestres, présentés comme des preuves de la puissance et de la miséricorde de Dieu. Elle conclut par une réaffirmation de la réalité inévitable de la résurrection et du Jugement dernier.
Cette sourate interpelle directement l’homme avec des questions rhétoriques sur la création, lui demandant s’il se considère comme le créateur de lui-même ou reconnaît que c’est l’œuvre de Dieu. Ce questionnement vise à briser l’illusion de l’autonomie et de l’orgueil humains, rappelant aux croyants leur véritable condition de créatures dépendantes de Dieu et les incitant à l’humilité et à la reconnaissance de la souveraineté divine.
Les versets interrogatifs renforcent cette interpellation, encourageant à une méditation sur l’origine de notre existence. Je les rappelle et je conclue par les enseignements majeures qui me paraissent en être tirés.
« 58 Avez-vous idée de ce que vous éjaculez ?
59 est-ce vous qui le créez ou bien Nous qui le créons ? »
أَفَرَأَيْتُم مَّا تُمْنُون
أَأَنتُمْ تَخْلُقُونَهُ أَمْ نَحْنُ الْخَالِقُونَ
Ces versets éclairent l’acte de création comme relevant du divin, suggérant que bien que l’action initiale puisse être humaine, la création ultime de la vie est une œuvre divine.
« 63 Avez-vous idée de ce que vous labourez ?
64 Est-ce vous qui le cultivez ? Ou si c’est Nous le cultivateur ? »
أَفَرَأَيْتُم مَّا تَحْرُثُونَ
أَأَنتُمْ تَزْرَعُونَهُ أَمْ نَحْنُ الزَّارِعُونَ
Cette interrogation met en avant la notion que les actes visibles de labour et de culture, bien que physiquement exécutés par des hommes , sont en essence des manifestations de la volonté divine.
68 Avez-vous idée de l’eau que vous buvez ?
69 Est-ce vous qui la faites descendre des nuages ? Ou Nous qui le faisons ?
أَفَرَأَيْتُمُ الْمَاء الَّذِي تَشْرَبُونَ
أَأَنتُمْ أَنزَلْتُمُوهُ مِنَ الْمُزْنِ أَمْ نَحْنُ الْمُنزِلُونَ
Cette interrogation met en évidence que bien que l’homme consomme une ressource vitale comme l’eau, il ne maîtrise pas son origine céleste, ni sa descente des nuages, actes relevant exclusivement de la puissance divine.
71 Avez-vous idée du feu que par frottement vous obtenez ?
72 Est-ce vous qui avez développé l’arbre propice, ou Nous qui le développons ?
أَفَرَأَيْتُمُ النَّارَ الَّتِي تُورُونَ
أَأَنتُمْ أَنشَأْتُمْ شَجَرَتَهَا أَمْ نَحْنُ الْمُنشِؤُونَ
Cette question suggère que, bien que l’homme puisse manipuler les éléments pour produire du feu, il ne contrôle pas la croissance de l’arbre qui fournit le bois nécessaire, une tâche qui relève de la volonté divine.
Ces versets nous enseignent que tant les actions humaines, leurs conséquences, ainsi que les ressources dont dispose l’homme — qui lui permettent d’entreprendre des actions telles que boire, manger et partager — sont en réalité des créations divines.
« Et Dieu vous a créé et a créé vos propres actions ». (37. 96)
وَاللَّهُ خَلَقَكُمْ وَمَا تَعْمَلُونَ
L’homme ne peut prétendre à la paternité d’aucune de ses actions, pas plus qu’il ne peut revendiquer la création de son propre être. Pourquoi alors l’homme devrait-il se gonfler d’orgueil ou croire en sa toute-puissance ? L’existence humaine, ainsi que sa capacité à agir, sont des dons accordés par le Créateur, qui seul attribue à chacun une place dans l’univers. Le Coran dit que l’homme a été ennobli en lui permettant d’agir davantage que n’importe quel être de la création.
« Certes, Nous avons honoré et ennobli les fils d’Adam. Nous les avons portés sur terre et sur mer. Nous leur avons procuré d’agréables nourritures. Nous leur avons donné la préférence sur beaucoup d’autres de Nos créatures.». (17.70)
وَلَقَدْ كَرَّمْنَا بَنِي آدَمَ وَحَمَلْنَاهُمْ فِي الْبَرِّ وَالْبَحْرِ وَرَزَقْنَاهُم مِّنَ الطَّيِّبَاتِ وَفَضَّلْنَاهُمْ عَلَىٰ كَثِيرٍ مِّمَّنْ خَلَقْنَا تَفْضِيلً
Cette prise de conscience devrait inspirer à l’homme humilité et reconnaissance envers la souveraineté divine, rappelant que tout pouvoir et toute capacité d’agir proviennent de Dieu.
Si les êtres humains cultivaient un sentiment de modestie et de gratitude face au pouvoir créatif divin et reconnaissaient pleinement leur dépendance vis-à-vis de la volonté divine, les maux tels que les guerres, la violence et la corruption pourraient être évités sur Terre.
Le drame existentiel de l’homme provient largement de son orgueil et de son arrogance à se croire maître de tout, à penser qu’il peut posséder des biens, ou qu’il a un droit inné sur certaines terres. Cette illusion de contrôle engendre les maux les plus profonds de notre monde. En reconnaissant notre place dans l’ordre divin, nous pourrions éviter bien des souffrances et des conflits.
En définitive, c’est l’orgueil qui cause la perte de l’homme et lui barre l’accès à la Miséricorde divine. L’illusion de se percevoir comme un égal de Dieu empêche de le connaître véritablement.
Rachid Hamimaz