La France rétropédale. Quelques jours après le mandat d’arrêt émis par la Cour pénale internationale (CPI) à l’encontre du Premier ministre israélien, la diplomatie française a évoqué hier une prétendue « immunité » dont Benyamin Nétanyahou pourrait bénéficier. Explications.
Quelques jours après le mandat d’arrêt émis par la Cour pénale internationale (CPI) à l’encontre du Premier ministre israélien, la France a clarifié hier sa position. Le ministère des Affaires étrangères a indiqué qu’Israël pourrait bénéficier d’une « immunité des États non parties à la cour ». Cette clarification a été rendue publique peu après le communiqué commun de la France et des États-Unis sur l’accord de cessez-le-feu entre Israël et le Liban. Plusieurs sources évoquent une capitulation diplomatique de Paris.
Coup de tonnerre diplomatique
Une « clarification » qui a fait l’effet d’un coup de tonnerre. Tout en affirmant qu’elle « respectera ses obligations internationales », le Quai d’Orsay a indiqué, dans un communiqué publié hier, que le texte fondateur de la Cour « prévoit également qu’un État ne peut être tenu d’agir d’une manière incompatible avec ses obligations en vertu du droit international en ce qui concerne les immunités des États non parties à la CPI ».
Une référence à l’article 98 du Statut de Rome. Le ministère des Affaires étrangères précise que « de telles immunités s’appliquent au Premier ministre Netanyahou et aux autres ministres concernés et seront prises en considération si la CPI devait nous demander leur arrestation et remise ».
Cette nouvelle interprétation française a suscité un vent de réprobation de la part d’associations, d’experts juridiques, et d’ONG. L’avocat Johann Soufi, spécialiste de droit international, déplore, via son compte X, une «déclaration inutile qui détruit encore plus la crédibilité – et la dignité – de la France ».
Une faveur d’Emmanuel Macron à Israël ?
Selon des révélations rapportées, ce mercredi, par deux quotidiens israéliens (Haaretz et Maariv), le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou aurait accepté de signer le cessez-le-feu avec le Hezbollah en échange d’une faveur : que Paris n’applique pas le mandat d’arrêt émis par la CPI.
Le premier ministre israélien aurait ainsi demandé à la diplomatie française d’invoquer « l’immunité » prévue par les Statuts de la CPI. Pour ne pas faire capoter les négociations, Paris aurait capituler sur ce point. Le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, a ainsi évoqué hier de possibles « questions d’immunité » pour « certains dirigeants » visés par des mandats d’arrêt de la CPI.
L’Élysée a refusé de commenter ces révélations. Un ancien diplomate a déclaré une « une capitulation honteuse qui n’était absolument pas nécessaire, sauf pour permettre à Emmanuel Macron de pouvoir parler avec Nétanyahou ».
Une interprétation paradoxale
« La France ment », accuse la Fédération internationale pour les droits humains (FIDH) qui désapprouve « catégoriquement les déclarations de la diplomatie française sur la prétendue immunité du premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou ».
« La France se plie une fois de plus aux exigences de Benjamin Netanyahu en le générant lui plutôt que la justice internationale », déplore Marine Tondelier, députée écologiste. Elle ajoute que cette interprétation du droit est « sûrement le deal pour que la France soit citée dans le communiqué d’annonce officiel du cessez-le-feu au Liban publié par la France et les Etats-Unis hier ».
Cette position française est d’autant plus contestable qu’elle contredit le soutien actif apporté depuis mars 2023 au mandat d’arrêt délivré par la CPI contre Vladimir Poutine. En toute logique, l’interprétation appliquée à Netanyahou devrait également s’appliquer au président russe, dont le pays ne reconnaît pas non plus la CPI.
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