Le Baromètre des Territoires 2025, publié par franceinfo et ici ce mardi, dresse le portrait d’une France fragmentée par une série de crises sans précédent. Cette vaste enquête est la troisième édition (la première en 2019 et la deuxième en 2021) réalisée par Elabe et l’Institut Montaigne. Le retour de la rédaction.
Réalisé auprès de 10 000 personnes dans les 12 régions hexagonales, le Baromètre des territoires révèle une population française déstabilisée par des bouleversements sanitaires, économiques, climatiques, et sociaux. Selon l’enquête, l’insécurité économique et physique n’épargne plus aucune catégorie sociale.
Le déclassement est désormais un risque partagé
« La pression de la fin du mois est devenue une expérience commune dans toutes les catégories de population », puisque 57% des employés et ouvriers craignent d’avoir du mal à boucler leurs fins de mois, 50% des professions intermédiaires et 44% des cadres.
Près de 40 % des Français ne réussit à finir le mois qu’en recourant à des économies ou à des emprunts, tandis qu’un parent isolé sur cinq a été contraint de déménager. Les arbitrages financiers portent également sur l’éducation : près de la moitié des familles modestes ont réduit les activités extrascolaires de leurs enfants, et 30 % ont sollicité une aide financière auprès de proches.
« L’insécurité a dépassé les frontières des quartiers populaires, la crainte de ne pas pouvoir se soigner a contaminé les grands centres urbains », souligne l’étude. La précarité s’accompagne d’un sentiment croissant d’insécurité. Près de la moitié des Français (46 %) se sentent exposés à une agression physique. Cette crainte est particulièrement prégnante chez les femmes et les jeunes : une femme sur deux de moins de 35 ans a déjà été victime de harcèlement.
Climat, santé et précarité
La vulnérabilité climatique est également devenue une réalité : entre canicules, inondations et incendies, un Français sur deux redoute une dégradation de ses conditions de vie due au dérèglement climatique. Cette préoccupation varie toutefois selon les régions.
En parallèle, le système de santé français demeure fragile. 54 % des Français craignent de ne pas pouvoir se soigner, une inquiétude amplifiée par les peurs liées aux pollutions environnementales. « Asthme, allergies, cancers : cette peur n’épargne aucune classe d’âge », alerte le Baromètre.
Si la précarité touche l’ensemble de la population, les jeunes sont les plus affectés. Ainsi, 47 % des 18-34 ans se sentent exposés au risque d’isolement, et 56 % redoutent des problèmes de santé mentale. Ils sont également plus nombreux à craindre une dégradation de leur niveau de vie.
Méfiances des élites et modèle social
Face à ces défis, la confiance dans les institutions s’effondre. Moins de la moitié des Français estiment que le président ou le maire ont les moyens d’améliorer leur quotidien. Trois Français sur dix jugent qu’aucun élu ne s’intéresse réellement à leurs problèmes. Cette défiance s’étend également aux experts, enseignants, et médecins.
Même la véracité des statistiques publiques est questionnée : 61% ne croit plus aux statistiques publiques (chômage, dettes…). Les médias sont aussi concernés : 57% des Français dénoncent le traitement médiatique de l’actualité dans un monde où il « devient difficile de faire la différence entre une opinion et les faits ». 66% d’entre eux ne font pas confiance aux journalistes.
Malgré ce climat morose, les Français expriment un attachement fort à leur modèle social et à la solidarité. Cependant, ils recherchent aussi un rééquilibrage entre travail et vie personnelle. 68 % des salariés préfèrent gagner moins pour avoir plus de temps libre et neuf Français sur dix privilégient un métier épanouissant à une grande carrière. En l’occurrence, 81% des Français aspirent toujours à la stabilité du CDI.
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