En Inde, la communauté musulmane se mobilise après l’adoption, le 5 avril, d’une nouvelle loi discriminatoire. Le Parlement a validé une réforme foncière visant le patrimoine musulman (waqf), notamment les mosquées et les cimetières. Des manifestations ont éclaté dans plusieurs régions, avec une flambée de tensions dans l’État du Bengale-Occidental. Explications
Par une nouvelle mesure discriminatoire, le gouvernement indien dirigé par Narendra Modi et son parti, le Bharatiya Janata Party (BJP), entend renforcer son contrôle sur les biens de la minorité musulmane. La loi, adoptée au parlement, permet désormais à des non-musulmans de siéger dans les conseils d’administration des institutions qui gèrent le waqf, c’est-à-dire le patrimoine islamique.
Une atteinte directe au droit de propriété
Baptisée « Waqf Boards », cette législation est perçue par les représentants de la communauté musulmane comme une atteinte directe au droit de propriété. Ces derniers craignent notamment la saisie de mosquées et de sites religieux historiques, qui pourraient être remis à des groupes ultranationalistes hindous.
Ces mouvements revendiquent depuis longtemps plusieurs lieux de culte musulmans, qu’ils considèrent comme érigés sur d’anciens temples ou lieux sacrés hindous. Le BJP, bien qu’ayant perdu sa majorité aux élections de 2024, a tout de même réussi à faire adopter ce texte grâce à l’appui de plusieurs alliés.
La loi concerne 872 000 biens religieux et sociaux musulmans, incluant des mosquées, écoles, commerces, cimetières et orphelinats, pour une valeur estimée à 14,2 milliards de dollars.

Appel à la mobilisation
De nombreuses voix se sont élevées contre cette législation. Le très influent All India Muslim Personal Law Board (AIMPLB) a dénoncé une loi « injuste » et annoncé, samedi 5 avril, son intention de saisir la justice. L’organisation promet de lancer un mouvement national, en coordination avec d’autres groupes communautaires, pour protester comme une « violation de droits constitutionnels ».
Depuis lundi 7 avril, de nombreuses manifestations ont eu lieu dans de grandes villes, notamment dans des États gouvernés par l’opposition comme Calcutta (Bengale-Occidental) et Bangalore (Karnataka), où la tension est palpable. Il s’agit de la plus grande mobilisation musulmane depuis 2019.
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Trois morts et 200 arrestations
Au Bengale-Occidental, où les musulmans représentent 27 % de la population, la situation s’est nettement détériorée ces derniers jours. Des heurts ont éclaté entre communautés, avec des incendies de commerces et de véhicules de police.
Le bilan fait état de trois morts (deux hindous et un musulman), au moins 15 policiers blessés et plusieurs arrestations, notamment dans l’État voisin de l’Assam. Le gouvernement nationaliste de Narendra Modi est régulièrement accusé de marginaliser la communauté musulmane, qui compte plus de 200 millions de fidèles.