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‘Ali Ibn Abi Talib, l’étendard de la maison prophétique

Suite de notre série de portraits des figures fondatrices de l’islam post-prophétique. Cousin et gendre du prophète ﷺ, ‘Ali Ibn Abi Talib est une figure musulmane emblématique et consensuelle. Elevé au sein du giron prophétique, il est le premier enfant à entrer en Islam. Puit de science, dévoué à la paix et à la justice, son règne, en tant que 4e calife, marque un tournant historique pour la communauté musulmane.

Il se nomme Abou Al-Hassan, ‘Ali fils de Abou Talib, fils de ‘Abdal-Mouttalib, fils de Hachim, fils de ‘Abdal Manaf. Il est donc le fils de l’oncle paternel du Messager de Dieu ﷺ et son cousin. Sa mère se nommait Fatima fille de Asad. Il est né aux alentours de l’an 600, dix ans avant la révélation. Le père de ‘Ali, Abou Talib, était le frère du père du prophète ﷺ.

‘Ali avait trois frères et deux sœurs : Talib, Aqil, Ja’far, Oumm Hani et Joumana. Tous se convertirent à l’Islam hormis Talib qui resta sur la religion de ses pères. L’une des particularités de ‘Ali est qu’il fut le premier enfant à croire au dernier des Prophètes et Messagers d’Allah ﷺ. En effet, peu après les premières révélations que reçut Mouhammad ﷺ, son épouse Khadija, son ami Abu Bakr et son cousin Ali, ne tardèrent pas à se convertir à la religion musulmane.  

Alî ne s’est pas marié avec une autre femme que Fatima jusqu’à son décès. Fatima mourut six mois après la mort de son père ﷺ. Après la mort de Fatima, il se maria avec d’autres femmes. Son surnom (kounya), Abou Al Hassan, fait référence au premier fils, Al Hassan, qu’il eut avec sa femme Fatima. Il eut également de nombreux enfants dont les plus célèbres, hormis Al Hassan, fut Al-Hussein et Muhammad ibn Al-Hanafiya. Il fut l’un des quatre califes rashîdûnBien-Guidés »).  

Élevé au sein du giron prophétique

Pour décharger les responsabilités de son oncle Abou Talib, le prophète Mohammed ﷺ, proposa à son oncle de s’occuper de Ali alors qu’il était encore tout jeune. Abou Talib accepta et Ali grandit ainsi sous le toit du messager de Dieu. Cette proximité unique lui permit d’être élevé au sein du giron prophétique lui permettant d’obtenir une éthique exemplaire et une saine nature préservée. Raison pour laquelle Ali fut parmi les premiers à accepter l’islam.  L’exégète et historien Ibn Kathir rapporte :

« Le premier homme libre à avoir accepté l’islam fut Abou Bakr Siddiq, le premier enfant fut Ali ibn abi Talib, la première femme fut son épouse Khadija bint Khouwaylid et parmi les servants Zayd ibn Haritha, qu’Allah soit satisfait d’eux et les agrée. »

Ce compagnon de la première heure et membre éminent de la famille du Prophète ﷺ est notamment célèbre pour sa grande piété et son amour profond pour le Prophète. Il fut présent lors de tous les évènements importants, auprès du Prophète ﷺ, mise à part la conquête de Tabouk. 

Lorsque le Prophète ﷺ émigre de La Mecque à Médine, il demanda à son cousin Ali de rester dans son lit pour tromper les opposants quouraichite. Il lui laissa trois nuits pour rendre les objets restés en dépôt à leurs propriétaires. Ce n’est qu’une fois ces actes accomplis, qu’il put se rendre à Médine. Ali a donc émigré de La Mecque à Médine à pied. La même année 622, il épouse Fatima, fille du Prophète et de Khadija, devenant ainsi le gendre de ce dernier.  

Réplique de la maison du Prophète ﷺ

Son surnom « Abou Tourab »

‘Ali est célébré par le Prophète pour sa bravoure – d’après Tabarî, ‘Ali s’illustra au combat en 623 lors de la bataille de ‘Uhud avec un sabre que lui avait confié Muhammad, qui aurait alors déclaré : « il n’y a pas de héros comme ‘Ali ». Son autre surnom « Abou Toura, » traduit littéralement par « Père de la poussière » peut sembler étonnant à première vue, mais ‘Ali le chérissait plus que tout autre surnom.

Dans un récit prophétique, une anecdote symbolique revient sur les raisons de ce surnom : A la recherche d’Ali dans la maison de Fatima, le Prophète ﷺ interrogea sa fille pour savoir où se trouvait son époux. Fatima lui expliqua qu’une querelle avait éclaté entre eux, forçant Ali à quitter leur domicile.

Sans hésitation, le Prophète ﷺ se mit en quête de son gendre et le découvrit endormi dans la mosquée, la moitié de son corps couvert de poussière. Avec tendresse, le Prophète ﷺ entreprit de débarrasser Ali de la poussière, le nommant affectueusement « Abou Tourab ». 

Le récit de l’étendard

‘Ali était parmi les compagnons qui connaissait le plus les jugements d’arbitrage et qui était le plus détaché du bas monde. Il était également connu pour son courage et sa force. Un événement particulièrement important est d’ailleurs éloquent à ce sujet : lors de la bataille de Khaybar qui se déroula la 7ème année de l’Hégire à Médine, avant que la bataille ne commence, le Prophète ﷺ déclara : « Demain, je donnerai l’étendard à un homme qui aime Allah et Son Messager, qui est aimé de Dieu et de Son Messager et à qui Dieu donnera la victoire. ».  

Au matin, les gens se rendirent auprès du Prophète ﷺ. Chacun espérait recevoir la bannière. Alors, il dit : « Où est Ali Ibn Abi Talib ? Ils dirent : “Il a mal aux yeux ô Messager de Dieu ! “ Le Prophète ﷺ dit : “Envoyez quelqu’un pour qu’il aille me le chercher ». Lorsque ‘Ali vint, le Prophète cracha dans ses yeux et invoqua pour lui. Ainsi, il guérit et fut comme s’il n’avait souffert d’aucun mal. Puis, le Prophète ﷺ lui remis la bannière. 

Confusion générale après l’assassinat de ‘Othman

Suite à la mort du Prophète Mohammed ﷺ, ‘Ali prêta allégeance, comme l’ensemble des musulmans, à Abou Bakr après son intronisation au califat. Cependant, il est rapporté que ‘Ali prêta serment d’allégeance plus tard que les autres compagnons. Etant donné sa proximité avec le prophète ﷺ, il estimait que sa non-consultation dans ce choix important était préjudiciable. 

Sous les trois premiers califes, ‘Ali n’exerça pratiquement aucune fonction officielle politique ou militaire ; il se distingua toutefois par sa compétence en matière religieuse et sa connaissance profonde de la tradition prophétique (sounnah) pour conseiller et orienter les compagnons distingués par le rôle d’émir des croyants (Abou Bakr, ‘Omar et ‘Othman). Il était consulté lors de chaque grande décision importante et son avis avait du poids.  

Après l’assassinat de ‘Othman, en 656, une discorde voit le jour entre les Compagnons quant à l’attitude à adopter face aux meurtriers de ‘Othman. Sans moyen effectif et tout en condamnant fermement ce crime, ‘Ali n’entreprit pas immédiatement de représailles ni n’appliqua le talion sur les coupables pour éviter un embrasement général de la communauté.  

Cette attitude, et la suspension temporaire du Talion, suscita l’incompréhension d’une partie des Compagnons, notamment ‘Aïsha – la troisième épouse du Prophète -, Talha et al-Zoubayr, ainsi que des proches parents de ‘Othman (la tribu des Omayyades). C’est dans cette période de grande confusion, en l’an 35 de l’hégire, que ‘Ali devint le quatrième calife de l’islam par consensus des musulmans de Médine.  

La bataille du Chameau

A la tête de tout un groupe, ‘Aïsha, Talha et al-Zoubayr partent de La Mecque, où ils s’étaient concertés, pour la ville de Bassora, en Irak, afin d’appeler les gens à soutenir leur demande de l’application de la loi du talion sur les assassins du calife ‘Othman. Quand ‘Ali apprend la nouvelle du départ de ces trois éminents personnages pour l’Irak, il craint que cela soit le point de départ d’une division de la communauté.

Il décide alors, avec l’objectif de clarifier les choses, d’aller, à la tête lui aussi d’un groupe, trouver les trois Compagnons pour disperser les incompréhensions. Si les deux groupes sont sortis avec des lourds effectifs, nul n’a l’intention initialement d’en découdre avec l’autre. Arrivés sur les lieux, ‘Ali discute en aparté avec al-Zoubayr et lui rappelle un récit prophétique : “N’avais-tu pas entendu le Prophète  dire, alors que tu pliais ma main : « Tu le combattras alors qu’il sera dans son droit, puis il aura le dessus ? ».

Al-Zoubayr acquiesça et sortit aussitôt des rangs pour éviter de contredire la parole du Prophète ﷺ. Malheureusement, pendant la nuit, dans la confusion de la situation, des individus prirent l’initiative du déclenchement du conflit armé. C’est le début de la bataille dite “du Chameau” en référence à la présence d’Aïsha sur un chameau durant le combat. La bataille ne dure qu’une journée et se termine en faveur du groupe de Alî. Elle eut lieu en l’an 36 de l’Hégire (657). 

La bataille de Siffin

La position du Calife n’est toutefois pas assurée pour autant, puisque reste encore l’opposition du clan Omayyade. Celle-ci trouve un nouvel élan avec la prise de commandement de Mou’awiya, gouverneur alors de la Syrie (Cham), qui refuse toujours l’autorité califale de ‘Ali sous prétexte qu’il n’aurait ni châtier et ni envoyé les coupables du meurtre de ‘Othman.

Malgré des échanges d’abord diplomatiques, ‘Ali, dorénavant installé à Koufa, va former une armée pour restaurer son autorité et mettre un terme à la division de la communauté. Mou’awiya rassemble à son tour une armée au Cham. Cette première guerre civile entre musulmans, est nommé « al-Fitna al-Kûbra » (« la Grande Discorde »).

Après plusieurs mois de combat féroce, alors que l’armée du Calife prend le dessus, des initiatives sont soudainement lancées, sous l’impulsion de ‘Amr Ibn-al ‘As, pour mettre un terme à cette lutte. Un arbitrage, basé sur le Coran, est ainsi proposé par Mou’awiya et accepté par ‘Ali. L’initiative n’aboutira à rien de concluant et mènera une partie des partisans de ‘Ali (les kharijites), refusant l’arbitrage “humain”, à faire sécession. La bataille de Siffin prend fin. 

La sécession des futurs kharijites

Alors qu’Ali retourne vers Koufa avec ses effectifs, un groupe de plusieurs de milliers de personnes se sépare de lui et se rejoignent à un endroit appelé Haroura. Après l’échec de l’arbitrage avec Mou’awaiya, le groupe sécessionniste se radicalise et se déplace pour Nahrawan. Les Kharijites commencent alors des actions violentes et des attaques contre ceux qui ne partagent pas leur avis, les considérant comme des apostats.

Malgré l’envoi d’émissaire, dont le célèbre compagnon Ibn ‘Abbas, pour leur faire entendre raison, le groupe refuse toute concertation allant jusqu’à tuer un autre émissaire du Calife, Harith Ibn Mourra. Face à cet entêtement, ‘Ali n’a pas d’autre choix que d’aller mettre un terme à la menace que représentent les kharijites. Il se bat contre eux à Nahrawan et les écrase complètement en l’an 38 de l’hégire. 

Après sa victoire à Nahrawan, ‘Ali tente de mobiliser à nouveau ses troupes pour confronter l’armée de Mou’awiya, mais face à la fatigue de ses soldats, le Calife rebrousse chemin à Koufa. Quelques temps plus tard, dans la nuit du 17 de ramadan en l’an 40 de l’hégire (660), alors qu’il se rendait à la prière de l’aube, ‘Ali Ibn Abi Talib est assassiné par traîtrise par le kharijite Abderrahman Ibn Moujlam. L’émir des croyants, âgé de 63 ans, va mourir frappé par un coup d’épée empoisonnée.

Autorité et mérites d’Ali Ibn Abi Talib

Son décès consacre la victoire et l’accession au pouvoir de Mou’awiya. C’est le début du règne des Omayyades. Le califat d’Ali Ibn Abi Talib a duré quatre ans et neuf mois. Il fut éprouvé par de nombreux opposants et trois batailles : la bataille du Chameau, la bataille de Siffin et la bataille de Nahrawan. 

Ali ibn Abi Talib fait partie des honorables alliés de Dieu. Membre éminent de la maison prophétique (Ahl Bayt), il est l’un des imams bien guidés, le quatrième des califes « rashidoun », l’une des dix personnes assurées de leur vivant de leur entrée au paradis et l’un des compagnons les plus proches du Prophète ﷺ. L’envoyé de Dieu ﷺ consacra cette proximité par cette parole : « Tu es issu de moi et je suis issu de toi ».

Dans un autre récit prophétique, le Messager de Dieu ﷺ, ayant décidé de laisser derrière lui Ali  Ibn Abi Talib comme son Lieutenant pendant l’expédition de Tabouk, Ali  lui demanda : « Ô Messager de Dieu ! Me laisses-tu derrière, parmi les femmes et les enfants ? ». Le Prophète répondit alors : « N’es-tu pas content d’être à moi ce qu’Haroun avait été pour Moussa, à cette différence près qu’il n’y aura pas de Prophète après moi ? » 

Ses mérites sont trop nombreux pour être recensés. Son nom, ses vertus et son autorité spirituelle ont été parfois occultés, amoindris ou injustement critiqués. Les célèbres imam Ahmad ibn Hanbal et An-Nassai lui ont consacré des ouvrages compilant et rétablissant sa grandeur et ses innombrables distinctions.

La Grande Mosquée de Koufa, en Irak

La centralité d’Ali Ibn Abi Talib dans le chiisme

Le terme « chiite » (shi’a) provient de l’expression arabe shia Ali, signifiant « partisans d’Ali ». Ce courant, l’un des plus anciens de l’islam, émerge dès les premières décennies suivant le décès du prophète Mohammad ﷺ en 632. Il désigne globalement un groupe de musulmans, des débuts de l’islam, les Alides, qui considéraient qu’Ali Ibn Abi Talib devait être le successeur direct et légitime du Prophète ﷺ, aussi bien sur le plan politique que spirituel (wilayat).

Selon les chiites, cette désignation aurait été faite par le Prophète lui-même, avant sa mort, le 18 Dhoul hijja en l’an 10 de l’Hégire, le jour de “ghadîr” (sermon d’adieu). Cette divergence cristallisera une scission entre deux branches musulmanes (sunnisme et chiisme) sur la question du califat et la succession du Prophète ﷺ.

Ibrahim Madras

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