Une mosquée en Malaisie.
Journaliste, co-fondateur de Saphirnews, écrivain, auteur du livre « Le Pacte de Sourate Fatiha : Le contrat spirituel de l’islam », Amara Bamba publie sur Mizane.info un texte sur le sens du qualificatif Rabb (Seigneur) qui désigne Dieu dans le Coran.
Le mot « Rabb » apparaît au premier verset de sourate Fatiha. Il est le premier attribut divin qui suit Allah dans « Rabil Alamina ». On traduit l’expression par le « Seigneur des mondes ».
L’herméneutique évoque ainsi le Rabb comme « l’attribut divin le plus proche d’Allah ». Un mot riche, un mot à comprendre mais un mot complexe pour les francophones car il n’a pas d’équivalent en français. Seul le contexte détermine le sens du Rabb.
Les attributs du Rabb
Le professeur Hamidullah traduit le Rabbil-Alamina par « Le Seigneur des mondes ». Choisir Seigneur pour Rabb limite le risque d’erreur car Seigneur et Dieu sont quasiment synonymes en langage chrétien. Mais le Dr Salah Eddine Kéchrid traduit Rabb par « Seigneur-et-Maître ». Certainement pour tenter d’embrasser deux faces essentielles faisant appel à « la possession » et à « l’éducation ».
Le « maître » est celui qui enseigne, qui élève, qui éduque. Seigneur est, par contre, un vieux mot dont l’histoire est antérieure à la chrétienté. Avant le clergé catholique, le seigneur est la personne qui détient tous les pouvoirs sur des terres appelées sa seigneurie. Un pouvoir total qui lui donne tous les droits sur tout ce qui concerne sa seigneurie.
Un seigneur est de rang supérieur, un rang plus honorable que le reste. Son pouvoir est total, il est aussi absolu : pouvoir de vie ou de mort. Donc un seul et unique seigneur par seigneurie ; dont la décision est incontestée. Il est celui qui nourrit ou qui affame. Il administre les affaires, attribue les fonctions, les rôles et tranche en cas de litiges ; il est le juge des conflits, etc…
Quel que soit le domaine, rien ne s’oppose aux désirs, à la volonté du Seigneur sur sa seigneurie. Il a les droits qu’il se fixe. Ses devoirs sont ceux qu’il se donne. Chef de l’armée, il est craint et aimé ; il détient la clé du bien-être de chacun. Entrer dans ses grâces est signe de paix. Eviter sa colère et bénéficier de ses faveurs est la quête de tous.
Le Rabb est tout cela. Mais le Rabb est plus que ça. Le Rabb est attentionné et évoque la figure du père qui donne la vie. Le maître qui détient le savoir, la connaissance et qui s’applique à enseigner, à former, à éduquer.
Le Rabb soigne aussi. Il est le médecin scrupuleux, soucieux de la santé. Il est celui qui guérit. Il assure la sécurité et l’intégrité physique. Le Rabb protège comme Général d’armée qui assure la sûreté et la sécurité. Son évocation apaise le cœur et adoucit les angoisses, les peurs. Le Rabb est garant de la santé, garant du bien-être d’une manière générale.
On parle de Rabb pour le jardinier attentif, délicat qui soigne ses plantes avec délicatesse, tendresse et Amour. Il les attife comme il se doit, pour produire les meilleures fleures, les meilleures fruits, le meilleur parfum. Le Rabb est patient, affectueux, plein d’Amour et de bienveillance.
Le Rabbil est le Seigneur qui donne la vie
Le Rabb est toujours bienfaisant. Il n’est jamais du côté obscur et destructif. Il choisit toujours le côté positif, celui de la lumière ; celui qui fait le plus grand bien au plus grand nombre, le plus longtemps possible. Pour, cela, le Rabb n’est jamais loin, toujours proche, présent pour aider, pour porter, soutenir et encourager pour faire évoluer.
Je pense souvent à un coach pour le mot Rabb. Car le Rabb offre une assistance, ininterrompue. Il accueille le sujet en l’état et l’accompagne jusqu’au terme final où il est en capacité d’exprimer son pleine potentiel. Cela apparaît dans les commentaires exégétiques du mot Rabb.
Le Rabbil Alamine est donc le Seigneur qui donne la vie, qui entretient la vie et qui guide les êtres vivants le long de leurs chemins. Ce Seigneur, le Rabb, assure une présence magnanime et gentille, une présence permanente qui vise le plein épanouissement de chacun. Ce Rabb nous montre la voie pour accéder au plaisir, à la joie, au bonheur qu’est l’éternité du Paradis.
La vie humaine est ainsi organisée selon la volonté du Rabb. Lui, en tant que Rabb, est au-delà des notions de bien et de mal qui n’existent que par rapport à Sa volonté. Le Rabb est hors des limites contraintes d’espace et de temps. Il est sans sans limite ni équivalent. Et nul à lui n’est semblable.
Le Rabb est décrit, assis sur Son Trône entouré d’anges obéissants avec un contrôle total sur chaque chemin de vie, sur chaque destin humain quel que soit le trouble, quel que soit son problème.
Le Rabb connaît chaque humain par son prénom. Il connaît ses forces et ses faiblesses. Il sait aussi quelle leçon convient à chacun. C’est Lui qui guide chacun dans ses épreuves pour apprendre toutes les leçons dont il a besoin pour évoluer, s’épanouir, jusqu’à son plein éveil de conscience, hors des illusions du monde matériel. En un mot, le Rabb œuvre à l’épanouissement complet de chacun.
Il veille l’humain dans ses expériences, toutes ses expériences, jusqu’à l’expérience initiatique de la mort qui donne accès à d’autres dimensions de l’existence. Pour cela le Rabb est «Le Miséricordieux qui a enseigné le Coran» à l’ensemble du Cosmos, bien avant la créer notre humanité. C’est le Rabb qui insère l’humain dans le Cosmos à la place et dans le rôle de Son choix ; Il est le Créateur.
De la peur à l’amour
Le Rabb n’est pas seulement un gestionnaire qui gère Sa Création. Ce mot renvoie aussi à la figure du père. Un protecteur, bon, puissant, omniscient et omnipotent. Dieu est ce Père à qui rien n’est impossible. Il est le Rabb, le Seigneur qui ne manque de rien. Dieu d’abondance dont les serviteurs ne manquent de rien. Celui qui offre à l’humain, sur notre petite planète, tout ce dont nous avons besoin pour être heureux et épanouis. Tout ce qu’il faut pour gagner en conscience.
La Terre ne manque de rien sinon de conscience. Conscience du partage, de la collaboration, et de la coopération pour mutualiser les compétences disponibles sur la planète.
A la suite du Rabb (verset 1), la sourate Fatiha poursuit avec l’attribut d’Amour et de Miséricorde (verset 2). C’est pourquoi je vois l’Amour comme l’objectif majeur de l’évolution de conscience. Peut-être le moyen crucial de gagner en conscience.
Pour l’heure, l’humain est prisonnier de la peur. Cette peur installe un manque de confiance mutuelle. D’où le gaspillage nommé « dépenses militaires » estimées à 2 000 Milliards de dollars l’an dernier. Mon calcul donne près de 714 fois le budget des Nations-Unies. Ça donne idée de notre conscience sur la planète. Vu de l’extérieur, on peut se demander si l’humain est vraiment intelligent.
Peut-on dire qu’il est intelligent de dépenser plus 700 fois l’énergie de notre espèce à nous tuer les autres; à nous protéger les uns contre les autre au lieu de nous unir les uns aux autres. Si tel est l’intelligence, moi j’opte pour le contraire. Sourate Fatiha apporte des éléments à cette réflexion à partir du mot Rabb.
La compréhension du mot Rabb, dans ses dimensions multiples a un effet rassurant contre l’émotion de la peur. Du moins pour le croyant. Sortir de la peur ouvre la porte à l’Amour, à la Miséricorde qui fait l’objet du verset suivant le verset du Rabil Alamina.
Amara Bamba
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