Dans son rapport annuel publié mardi 25 mars, la Défenseure des droits Claire Hédon souligne l’ampleur « inquiétante » de la hausse des discriminations en France, liées à l’origine. Le rapport souligne notamment le rôle de « certains discours politiques et médiatiques (…) [qui] stigmatisent les immigrés et certaines minorité ». Zoom.
Dans son rapport annuel dévoilé, ce mardi, la Défense des droits met en lumière une « réalité alarmante » : les discriminations fondées sur l’origine, sont en constante augmentation. Une tendance illustrée par une hausse « inquiétante » de 53 % des signaux reçus par la plateforme dédiée à la lutte contre les discriminations entre mai et juin 2024, principalement liés à des comportements et propos racistes, antisémites et islamophobes.
La discrimination religieuse prend de l’ampleur
Ces discriminations ciblent en particulier des personnes portant des signes religieux distinctifs, comme le voile ou la kippa. Un phénomène qui traduit un « glissement du motif de l’origine vers celui de la religion ».
D’après une étude européenne, 34 % des personnes noires en France affirment avoir été victimes de discriminations, contre 24 % en 2016. De même, 47 % des personnes musulmanes déclarent avoir subi des actes discriminatoires en Europe, contre 39 % huit ans plus tôt. Un constat marquant : l’origine et la religion deviennent des critères de discrimination de plus en plus entremêlés.
« Les discriminations liées à l’origine restent un sujet tabou (…) la question est souvent éclipsée par les débats sur l’immigration et l’intégration », écrit George Pau-Langevin, adjoint à la Défense des droits, dans l’avant-propos du rapport. Le rapport pointe également du doigt « certains discours politiques et médiatiques (…) qui stigmatisent les immigrés et certaines minorités, contribuant ainsi à banaliser les discriminations ».

Peu de plaintes sont déposées
Pour étayer son analyse, la Défense des droits s’appuie sur plusieurs études, dont une enquête de l’Insee publiée en novembre 2024. Elle révèle que le sentiment de discrimination progresse d’une génération à l’autre chez les personnes d’origine non européenne, tandis qu’il diminue chez ceux originaires d’Europe.
Par exemple, 34 % des descendants d’immigrés d’origine asiatique ou africaine ne sont pas concernés, contre 26 % pour la génération précédente. Paradoxalement, malgré cette hausse des actes discriminatoires, les plaintes déposées auprès du Défenseur des droits ont chuté de 15 % en 2024.
Un recul attribué à un « non-recours massif », lié à la complexité des démarches, à la peur des représailles, à la méconnaissance des droits ou à un sentiment d’impuissance. « Ce que je constate, c’est une forme de résignation. De nombreuses personnes ne croient plus en la capacité des institutions à les protéger et n’osent même plus déposer un recours », alerte Claire Hédon.
Manque d’initiative de l’État
Après le handicap, l’origine représente désormais le deuxième motif de discrimination cité par les plaignants, passant de 13 % en 2023 à 15 % en 2024. George Pau-Langevin regrette un manque de volonté étatique :
« La lutte contre les discriminations manque toujours d’une vision cohérente et d’une réelle visibilité au niveau national. Les actions publiques se limitent souvent à des initiatives ponctuelles et sectorielles, dictées par les priorités du moment »
Elle insiste sur la nécessité d’une « impulsion nationale forte, relayée efficacement par les services de l’État ».