Les affaires Merah, Nemmouche, les frères Kouachi, Yassin Salhi (1), la décapitation d’Hervé Gourdel (2), les tueries du bataclan, l’attentat à Nice sur la promenade des Anglais le 14 juillet 2016 ont créé un climat de tension entre musulmans et non musulmans en France. Par ailleurs, le nombre élevé de jeunes Français partis combattre dans les rangs des djihadistes (3) et le redoutable défi de leur retour soulèvent bien des questions y compris parmi les musulmans. Au racisme « ordinaire » se sont ajoutés des peurs et des fantasmes politiques. On fait porter la responsabilité des persécutions, arrestations, viols, exécutions sommaires commises par « Daesh » sur l’ensemble des musulmans. On fait de chaque musulman portant une barbe, un radical pouvant basculer dans le terrorisme. Les discours jusque-là réservés à l’extrême droite tendent à se normaliser au sein des partis traditionnels, ainsi que chez des intellectuels de renom invités permanents des plateaux de télévision, qui confondent allègrement inquiétudes et fantasmes. Il devient alors plus facile de comprendre la peur qui se développe chez les Français pour lesquels, le recul de l’islamisme radical est un sujet prioritaire (61%), très loin devant celui des retraites (43%), de l’école (36%), de l’emploi (36%) ou même du pouvoir d’achat (30%) (4). Cette peur que l’on constate à chaque attentat peut se comprendre même si elle est souvent non fondée et irrationnelle car elle ne correspond pas à la réalité paisible de la vie de la grande majorité des musulmans de France. Cela étant, il ne faut certes pas être naïf ou aveugle. La tendance vers une certaine forme de radicalité des jeunes est une réalité. Cette radicalisation ne peut être vaincue seulement au moyen de mesures de sécurité conventionnelles. C’est pourquoi, il est essentiel d’étudier et discréditer les fondements idéologiques et théologiques de la pensée extrémiste et combattre ceux qui l’alimentent, la nourrissent et la financent. Beaucoup font l’économie de ce travail devenu indispensable.
Références
(1) Les auteurs des attentats de Toulouse et Montauban (janvier 2014), Bruxelles (décembre 2014), Paris (janvier 2015) et Saint-Quentin-Fallavier (juin 2015).
(2) Hervé Gourdel a été décapité en Algérie le 24 septembre 2014 par un groupe terroriste lié à Daesh.
(3) A titre personnel, je préfère les appeler terroristes, criminels ou «takfiristes»
(4) Sondage JDD du 02/07/2017