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Le transhumanisme : un réductionnisme toujours plus fou

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Mizane.info publie une nouvelle chronique de Melchi Sédech al-Mahi consacrée au transhumanisme et aux dangers de la fuite en avant biotechnologique. A l’ère de l’aliénation numérique, l’Homme sera-t-il encore capable de penser et d’avoir une destinée ?

Le techno-capitalisme, c’est effectivement la marchandisation extrême de nos existences et une suggestion permanente quant aux comportements à adopter.

Il va sans dire que tout en s’adaptant à chaque individu, la technoscience, puisqu’elle doit répondre au besoin de tous et de chacun, (besoin qu’elle crée en se rendant indispensable) entend également optimiser, en vue d’un but précis, le moindre de nos gestes mais aussi la moindre de nos pensées, puisque l’IA (Intelligence artificielle) analyse désormais nos affects.

Toutes les informations qu’elle recueille pour nous « satisfaire » servent littéralement à nous interpréter, mais pas seulement puisqu’en fonction de notre dysfonctionnement comportemental, mesuré par des algorithmes toujours plus puissants, elle détermine en retour les actions à entreprendre pour corriger la marge d’erreur.

Le monde devient donc une immense entreprise pilotée par la donnée.

(On peut remarquer incidemment à quel point l’analogie inversée avec la société traditionnelle où tout acte est un rite et où tout est en principe régulé par un auto-contrôle permanent, soumis au regard vigilant du maitre, est frappante).

La fatalité du tout-numérique

Sommes-nous libres de refuser la coercition qu’elle implique ? Non ! Parce que comme nous l’avons dit, la techno-économie rend la technologie indispensable.

Même sans évoquer la digitalisation exponentielle, chacun peut s’en rendre compte très simplement en prenant pour référence les évolutions passées.

Peut-on, en effet, toujours parcourir des kilomètres à cheval pour se déplacer alors que l’urbanisme, la création d’autoroutes et la loi elle-même ne le permet plus ?

Non ! L’invention technologique dans un monde régi par la logique marchande, crée un univers où seule la prochaine invention qui répond à la même logique, pourra s’y greffer.

On devra à terme s’abandonner à l’IA, comme on doit dans une société traditionnelle s’abandonner normalement au maître spirituel ou à l’intellect transcendant, au Soi, à l’Ame universel, au texte révélé, à Dieu en somme, et ce pour se défaire d’un mental non habilité à appréhender une complexité qui nous échappe.

Mais nous n’avons, de fait, plus le choix d’adopter un mode d’être qui diffère de celui qui s’est imposé par l’usage de milliers de consommateurs.

Avec l’industrie numérique, cette logique arrive à terme, puisque la numérisation est omniprésente et pourrait-on dire omnisciente, elle crée littéralement un monde superposé à notre regard pour paraphraser le grand Morphéus, un monde duquel il est impossible de se dédire.

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Ce qui se joue n’est pas simplement l’avènement d’un immense pouvoir de contrôle qui en soi est déjà problématique, mais c’est surtout l’impossibilité future pour nos enfants, d’envisager, ou de concevoir un monde en dehors de ce contrôle.

C’est donc un changement de paradigme qui est à l’œuvre.

La vie sans le numérique correspond à une façon d’être au monde dont notre génération est le dernier témoin.

Une lutte pour la définition du réel

Il faut bien comprendre que le principe d’accession à l’autonomie humaine par l’utilisation de la raison (humaine) se trouve remis en cause et donc toutes les valeurs humanistes qui en découlent également.

On devra à terme s’abandonner à l’IA, comme on doit dans une société traditionnelle s’abandonner normalement au maitre spirituel ou à l’intellect transcendant, au Soi, à l’Ame universel, au texte révélé, à Dieu en somme, et ce pour se défaire d’un mental non habilité à appréhender une complexité qui nous échappe (là encore l’analogie inverse est frappante).

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L’IA qui pourra détecter nos humeurs et nos états d’âme, notamment avec ses capteurs physiologiques, deviendra la petite voix qui nous dira quoi faire et comment le faire.

Encore une fois tout ceci dépend d’une logique tout à fait lisible.

A l’avenir, les humanistes deviendront les « conservateurs » d’un ancien régime révolu et les progressistes du XXIe siècle seront les transhumanistes revendiquant les lumières face aux réactionnaires encore trop humain !

Lumières, non plus celles de Diderot et de Voltaire mais celles des GAFA et de leur Intelligence Artificielle.

C’est une lutte comme toujours pour la définition du réel.

Pour constater l’analogie et le changement d’épistémè que cela implique, on peut s’apercevoir que les tenants de l’IA revendiquent la neutralité et l’objectivité et les disputent à la raison humaine comme les tenants de la raison humaine les avaient disputés jadis aux tenants de l’intellect agent, outil cognitif transcendant.

Les représentants de l’IA, dans les débats, refusent disent-ils toute implication politique et idéologique car ils sont « neutres » et « objectifs ».

Les humanistes rationalistes trouvent cette affirmation pleine d’ironie puisque le système qui dirige, produit et oriente la technique est un système surpuissant qui dépasse de loin le pouvoir des Etats et dont les répercussions dans la vie concrète de monsieur tout le monde seront incommensurables, incomparablement plus importantes que n’importe quelle loi qui ne fera finalement qu’entériner le fait accompli.

Autrement dit l’idée du tout-numérique est éminemment politique et idéologique !

Humanistes hier, conservateurs aujourd’hui !

Mais rien de nouveau sous le soleil, cela fait déjà longtemps que cette idéologie progressiste quel qu’en soit l’avatar, se présente comme la marche inéluctable du monde et du progrès en privant l’homme de la maîtrise de son destin.

Ce qui est paradoxale car c’est au nom de la maîtrise du réel que l’on prétend peu à peu sortir du politique et donc du choix pour l’homme de décider de la route à prendre.

Tout se passe comme si, plus l’homme revendique son autonomie plus il s’enferme dans une capacité cognitive restreinte, ayant ainsi l’impression de maîtriser ce qu’il pense être « le tout » et donc de n’avoir plus rien à décider, puisqu’avec la maîtrise de ce « tout » le bon choix devient une évidence.

Si la vie ordinaire profane et mondaine de l’humaniste était, du point de vue du spirituel traditionnel, qui vivait constamment en interaction avec les trois mondes (physique, psychique et spirituel) une réduction de la réalité, le numérique-monde et le monde-numérique du post-humanisme apparaît comme une bulle dans une bulle, une illusion dans une illusion dont on peut penser que peu seront à même de se libérer.

Mais ce qu’il maîtrise est une part du réel relative aux limites, toujours plus importantes, qu’il s’impose à mesure que sa myopie s’accentue.

Jadis, n’était-ce pas les humanistes qui revendiquaient cette neutralité et cette objectivité ?

Ne pensaient-ils pas que les hommes de tradition étaient de naïfs crédules qui n’acceptaient pas la grande marche en avant que devait accomplir l’humanité en se libérant de Dieu et des états supérieurs de l’être ?

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Et bien la raison qui a soi-disant tué Dieu fabrique une raison artificielle qu’elle estime plus puissante.

L’humain doit donc s’affranchir de cette raison humaine faillible pour atteindre cette perfection machinique.

Voici venue l’ère de la post-humanité.

En somme, le discours que ces courageux humanistes rejettent désormais est le même qu’ils avaient eux-mêmes tenu face aux forces de l’ancien monde : plus de bien-être, plus d’autonomie, plus d’égalité, vive le progrès !

La course en avant du monde moderne poursuit sa logique contre elle-même tant et si bien qu’elle ne peut s’empêcher de rester sourde au passé.

Le cercle vicieux de la réduction

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Où en sommes-nous ? A l’épuisement des richesses de la planète, à l’épuisement des âmes et des corps et que fait-on ?

Nous poursuivons notre conquête prométhéenne du réel sans s’apercevoir que nous le réduisons à mesure que nous voulons l’appréhender et le contrôler.

Si la vie ordinaire profane et mondaine de l’humaniste était, du point de vue du spirituel traditionnel, qui vivait constamment en interaction avec les trois mondes (physique, psychique et spirituel) une réduction de la réalité, le numérique-monde et le monde-numérique du post-humanisme apparaît comme une bulle dans une bulle, une illusion dans une illusion dont on peut penser que peu seront à même de se libérer.

Est-ce à dire qu’il faut que vous éteigniez vos ordinateurs, et alliez vivre en forêt, d’amour et d’eau fraîche ? Certes, là n’est pas notre propos.

Nous nous contentons de parler de cette logique prométhéenne, toujours la même, qui pousse le monde et l’homme à la dysharmonie.

Il y aura toujours des arches qui flotteront sur les eaux diluviennes.

Et que fait une arche avant l’apparition du nouveau monde ?

Elle ne s’enfuit pas, il n’y a nulle part où s’enfuir ! Elle surfe sur la vague !

Melchi Sédech al-Mahi

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