Depuis l’arrivée au pouvoir de Narendra Modi, la présence des musulmans en Inde est devenue problématique pour les adeptes de l’idéologie nationaliste du Bharatiya Janata Party. Par divers moyens, ces derniers ne cessent de marginaliser la communauté. La probable réélection de Modi lors des législatives pourrait généraliser cette politique. Zoom.
Jadis souverains (sultanat de Delhi, empire moghol), les musulmans en Inde sont devenus aujourd’hui des indésirables, marqués par la paupérisation et vivant principalement de petits métiers souvent sous le seuil de pauvreté.
Le suprémacisme hindouiste, mise en pratique par Narendra Modi, n’a fait qu’aggraver leur situation en remettant en cause leur légitimité à participer à la société indienne et les présentant comme des ennemis intérieurs, liés au Pakistan, accusés de menacer la société hindoue par divers moyens notamment démographique.
Une constante détérioration depuis 1947
La communauté musulmane en Inde est la minorité la plus ancienne et la plus importante au monde (209 millions de personnes, 14,4 % de la population). L’histoire de cette religion dans le sous-continent indien a donné naissance à des communautés éparses, partageant les langues et cultures locales.
La détérioration de leur situation commence avec la colonisation britannique puis surtout la partition de 1947 qui leur porte un coup fatal, avec le départ des élites pour le Pakistan renforçant de facto l’importance des basses castes.
Depuis, en plus d’une paupérisation fulgurante, les musulmans souffrent d’une sous-éducation chronique et d’un taux d’alphabétisation inférieur à la moyenne nationale. On constate également une sous-représentation chronique des musulmans dans les instances électorales et les institutions étatiques (administration, justice, police).
La montée du nationalisme hindoue
Les partisans du Bharatiya Janata Party (BJP) prônent un retour à une culture exclusivement hindoue, épurée de son héritage moghol, utilisant la désinformation et la réécriture de l’histoire. La destruction de la mosquée de Babour à Ayodhya en 1992 et le massacre de milliers de musulmans qui s’en est suivi illustrent cette politique.
Le pogrom de 2002 au Gujarat, six mois après la nomination de Modi, montre les conséquences à long terme de l’arrivée au pouvoir des nationalistes hindous. En Uttar Pradesh, dirigé par Yogi Adityanath, des mesures extrêmes ont été annoncées, telles que l’installation de représentations de dieux hindous dans les mosquées et l’expulsion des musulmans vers le Pakistan.
La montée de l’islamophobie s’accompagne notamment d’appels au boycott économique, à la haine, au meurtre, et d’une machine de discrimination visant à exclure les musulmans de la vie quotidienne, économique et institutionnelle.
L’Inde aux mains des nationalistes ?
Les humiliations infligées aux musulmans en Inde incluent des lois restreignant leurs droits, comme l’interdiction des mariages interreligieux et de l’abattage des vaches en Uttar Pradesh. On se rappelle également du registre des citoyens en Assam (2019), rendant apatrides 1,9 million de personnes, principalement des musulmans.
La Cour suprême participe à cette discrimination en soutenant systématiquement ces mesures. En 2019, elle a notamment attribué le site d’Ayodhya aux hindous et autorisé la construction d’un temple inauguré en grande pompe par Modi en janvier 2024.
Qu’en est-il finalement du vote musulman ? Si la communauté avait tendance à se tourner vers des partis régionaux fondés sur la caste (comme le Samajwadi Party, « Parti socialiste »), elle donne aujourd’hui la priorité aux partis sécularistes qui leur garantisse des droits en tant que minorités religieuses et qui permette de faire barrage au BJP.
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