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Martin Lings, un esprit au service du Divin

Suite de notre chronique « un jour, une mémoire » – une série de portraits concis de diverses personnalités éminentes – consacrée, cette semaine, à l’écrivain et spécialiste du soufisme : le Cheikh Martin Lings.

C’est dans la petite localité anglaise de Westerham que le professeur Martin Lings – connu également sous le nom de Abu Bakr Sirâj ad-dîn – rendit son dernier souffle le 12 mai 2005 à l’âge de 96 ans. Au terme d’une vie « terrestre » jalonné de voyages initiatiques, de cheminements spirituels, d’exaltations intellectuelles et de rencontres décisives.

Martin Lings naquit dans le comté de Lancashire en Angleterre en 1909. C’est durant ses études de Lettres à l’université d’Oxford qu’il se lia d’amitié avec un de ses professeurs, Clives Staples Lewis, qui l’encouragera à se tourner vers la littérature étant donné ses facultés pour l’écriture.

En 1932, Martin Lings obtint son baccalauréat d’arts en littérature anglaise. Tout au long de son cursus, il montra un attachement particulier aux œuvres de Shakespeare, œuvres qu’il enseignera bien plus tard au Caire en Egypte. C’est en 1935, obtenant un poste de conférencier à l’Université de Kaunas en Lituanie, qu’il découvre les écrits des philosophes et métaphysiciens René Guénon et Frithjof Schuon. Une véritable révélation !

Ressentant une attirance intellectuelle mais également un fort besoin de quête mystique, Lings entreprend un voyage vers la Suisse, à Bâle plus précisément, à la rencontre de l’écrivain Frithjof Schuon. Trouvant, à son contact, un sens à ses besoins spirituels et un modèle pour son propre cheminement, Martin Lings se convertira à l’Islam et prendra le nom de Abu Bakr Sirâj ad-dîn.

Pérégrination en Egypte

En 1939, Martin Lings se rend au Caire chez son ami d’enfance Patterson – assistant de René Guénon sur place – et également converti à l’islam sous le nom de Husayn Nûr.

Le déclenchement de la seconde guerre mondiale,  rendant impossible son retour en Lituanie, fut paradoxalement l’opportunité pour Lings de s’installer durablement en Egypte et de se plonger totalement dans les œuvres de Guénon chez qui il officiera en tant qu’assistant à la suite d’un accident subit par Patterson l’empêchant de poursuivre cette fonction.

Abu Bakr Sirâj ad-dîn profita de son long périple cairote pour épouser Lesley Smalley (converti sous le nom de Rabi’âh) en 1944 et enseignera, à l’université du Caire, les œuvres de Shakespeare aux étudiants égyptiens jusqu’en 1952. La révolution égyptienne battant son plein, il ne purent rester plus longtemps sur place étant donné les violences encourus contre la population anglaise.

Martin Lings en 1948 dans les rues égyptiennes

Retour aux sources et renommée internationale

De retour dans son pays natale en Angleterre, Lings poursuit ses études de Lettres et en langue arabe puis obtint une licence et un doctorat en 1959. Sa thèse portant sur la personnalité du soufi algérien Ahmad al-‘Alawî de Mostaganem, publié en 1961, rencontra un succès fulgurant. Il sera, par la suite, nommé conservateur des manuscrits orientaux au British Museum jusqu’en 1973 puis à la Bristish Library.

Le Cheikh Martin Lings publia une quinzaine d’ouvrages dont sa célèbre biographie (sira) du prophète de l’Islam (PBDSL), publié en 1983, qui sera saluée par le monde arabo-musulman et reste, à ce jour, l’une des sira les plus appréciés par les lecteurs issus aussi bien d’occident que d’orient.

On compte parmi ses thèmes de prédilection souvent abordé à travers ses écrits le soufisme auquel il restera fortement attaché, la critique du monde moderne suivant en cela l’héritage guénonien, le pérennialisme, cette philosophie de la Tradition qui suscite encore de multiples débats de nos jours et la calligraphie islamique qu’il abordait de manière ésotérique et subtil.

Voici un aperçu succinct des titres de ses livres :

-Le Livre de la Certitude : la doctrine soufie de la Foi, de la Vision et de la Gnose (1952, réédité par les éditions Tasnîm)

-Un saint soufi du vingtième siècle : le cheikh Ahmad al-Alawî (1961 Le Seuil)

-Le Prophète Muhammad : sa vie d’après les sources les plus anciennes (1983, Le Seuil),

-La Onzième heure : la crise spirituelle du monde moderne à la lumière de la tradition et des prophètes (Tasnîm)

-La Mecque des origines à nos jours (Tasnîm)

-Retour à l’Esprit : questions et réponses (Tasnîm)

-Croyances anciennes et Superstitions modernes, (Pardès) 

-Symbole & Archétype : essai sur le sens de l’existence, (Tasnîm)…

Martin Lings sera rappelé à Son seigneur le 2 mai 2005, à son domicile, quelques heures à peine après l’achèvement de son dernier ouvrage (Retour à L’esprit). Il fut enterré dans le jardin de sa maison entouré des siens.

Ibrahim Madras

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