Selon le 3e baromètre Ifop pour la Fondation pour l’enfance, neuf professeurs de primaire sur dix observent une augmentation des troubles du comportement des élèves liés aux écrans. Même constat chez près de six parents sur dix. Dans le même temps, deux tiers des enseignants de l’école élémentaire utilisent les écrans durant leurs cours. Explications.
C’est un consensus plutôt paradoxal : les enseignants perçoivent majoritairement les effets nuisibles des écrans sur leurs élèves, tout en étant contraints de recourir à des outils comme les tableaux numériques et les tablettes.
Les conséquences d’un usage excessif des écrans
Selon un baromètre Ifop réalisé pour la Fondation pour l’Enfance, neuf professeurs de primaire sur dix (parmi les 400 interrogés) observent une hausse des troubles comportementaux liés aux écrans (94 %) et des difficultés d’apprentissage (89 %), notamment en matière de langage, de motricité ou de graphisme.
Le rapport « À la recherche du temps perdu », commandé en avril 2024 à la demande du président de la République, souligne que les technologies numériques « présentent des risques aujourd’hui établis par la science sur certains aspects de la santé physique des enfants et des adolescents », comme des troubles du sommeil, une sédentarité accrue et un risque accru de surpoids.
Le document cite également plusieurs études qui pointent un « lien entre un usage excessif des écrans récréatifs et une dégradation des capacités attentionnelles ». Chez les enfants de 2 à 6 ans, par exemple, un usage quotidien des écrans supérieur à une heure ou un temps de télévision excédant 30 minutes « est souvent associé à de moins bonnes performances cognitives globales, attentionnelles, langagières et socio-émotionnelles ».
Conspués mais massivement utilisés
Pourtant, les écrans sont massivement intégrés à l’école. Près des deux tiers des enseignants en primaire (68 %) et même 38 % des enseignants en maternelle y ont recours. Globalement, 72 % des professeurs interrogés utilisent des écrans pour faire cours, tandis que 29 % proposent aux élèves des outils individuels comme des tablettes.
Cette omniprésence semble en contradiction avec les effets négatifs que les enseignants eux-mêmes constatent. « Notre hiérarchie nous demande d’utiliser le numérique au quotidien, cela fait partie de la grille d’évaluation », expliquait ce mercredi Aude Denizot, enseignante et membre du collectif Éducation numérique raisonnée.
Elle explique que les outils numériques sont si solidement intégrés à la formation initiale des enseignants que certains finissent par ne plus savoir travailler sans eux.
Les parents loin d’être exemplaires
Du côté des experts, la frustration est palpable. « Aucun arbitrage n’a été fait après la publication de ce rapport », regrette Joëlle Sicamois, directrice de la Fondation pour l’Enfance. « Il y a des injonctions contradictoires permanentes ».
Les parents sont également conscients des impacts des écrans (93 %), y compris des conséquences négatives. Cependant, seul un parent sur deux affirme qu’il ne consultera pas son téléphone en présence de ses enfants, et seulement 41 % se disent prêts à éteindre la télévision durant les repas.
« Nous, parents, scrollons en moyenne 145 km par an et passons 56 heures par semaine devant nos écrans. Nous devons également reconnaître que nos propres usages sont loin d’être exemplaires », a rappelé Damien Giard, directeur numérique chez Bayard.
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