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Un ramadan sous le signe de la Palestine

Le commencement du mois de jeûne de Ramadan 2024 va incontestablement s’accomplir sous le signe de Gaza et de la Palestine assiégée. Un éditorial signé Fouad Bahri.

Dans les annales du ramadan, peu d’années auront été aussi intenses que cette année 2024. Le génocide en cours du peuple palestinien décrété par les autorités sanguinaires de Tel Aviv a sans aucun doute marqué une étape cruciale dans l’avenir de la conscience universelle. Le soutien actif des pays occidentaux, dont la France, dans la commission de ce génocide a ouvert une brèche qui ne se refermera plus.

Le feu de l’Enfer destructeur des bombes, missiles ou balles israéliens s’abattant comme une pluie fatale sur la population civile palestinienne, ces images de visages décharnés et affamés d’enfants palestiniens au regard spectral accusateur tourné vers un monde assistant, complice ou impuissant, à la mise à mort infâme de l’innocence, a ouvert lui aussi une page sombre de notre histoire.

La défection des pays musulmans

L’abandon de la cause palestinienne par la grande majorité des états majoritairement musulmans a également soulevé un vent de colère contre la trahison éhontée des gouvernements entrés en collaboration avec Israël, certains passés maîtres dans le double-jeu de l’indignation verbale contre les crimes de l’armée sioniste quand des shekels reconvertis en dollars tombaient et tombent encore dans les caisses de l’état, récompense juteuse pour de beaux contrats énergétiques et commerciaux. L’argent dissipe bien des scrupules.

Mais les peuples musulmans, eux, ne sont pas dupes et ne l’entendent pas ainsi. Le soutien à la Palestine, à une Jérusalem libre, à une Gaza soulagée, n’a pas déserté leurs pensées. Les manifestations de soutien n’ont jamais cessé. Rassemblements politiques, boycott des produits de l’occupant et des produits de ses alliés (américains), le mois de Ramadan va être l’occasion d’intensifier ces actions de soutien en les renforçant d’un dispositif supplémentaire et non négligeable : l’invocation divine en faveur des opprimés.

La levée de l’Homme califale

Le mois de Ramadan, mois célébrant la révélation du Coran, Parole et banquet de Dieu offert à l’humanité et par-delà elle à l’ensemble de la création, va réunir toute une communauté mondiale de cœurs et d’esprits orientés vers le Dieu vivant qui a donné naissance à ce monde, Celui qui a crée l’Homme pour une destinée élevée et lui a confié ce redoutable privilège de porter la responsabilité de ses actes.

L’Homme califale, lieutenant de Dieu, autrement dit créature tenant lieu des attributs de Dieu, est appelé à accomplir un destin héroïque dans sa quête de vertu, dans sa soif d’absolu, dans son exigence de justice et de vérité. Nulle meilleure moment que Ramadan pour accomplir cette noble vocation.

La prière est puissante, l’invocation a défait des empires. Dieu ne saurait être mis en échec. Dans la douleur et le désespoir de ceux qui s’estiment vaincus, battus et humiliés par l’oppresseur, dans la légion de martyrs sans cesse renouvelée, naît au cœur du chaos la graine de l’espoir qui porte en son germe l’avenir et sa règle infaillible : la victoire ne peut survenir que par la résistance et cette victoire est trop grande pour être contenu sur cette seule terre. Elle est appelée à briller pour l’éternité au royaume de l’Éternel.

Toutes les religions n’ont eu de cesse de proclamer ce même message en des langues différentes, et en des temps aussi éloignés entre eux que les galaxies du cosmos : la gloire du Seigneur brillera pour l’éternité au terme du chemin, jamais durant son cours. Le chemin n’est pas terminé, la vie se poursuit, la lutte demeure et le sanctuaire des élus n’est pas rempli.

L’invocation en faveur des opprimés

Dans cette nuit de la barbarie occidentale qu’Israël a décidé de porter jusqu’au terme du crépuscule, un premier rayon annonce donc la fin, toujours brutale et meurtrière, d’un cycle, l’arrivée au monde, toujours précédée d’un cortège de douleurs, d’une ère nouvelle, enrichie des fautes du passé et des espoirs en un avenir plus digne.

Ce rayon de lumière, ce rayon d’espoir va briller tout un mois durant mais pas seulement. Il lance le départ d’une série d’invocations nocturnes en faveur des opprimés du monde entier avec au centre des litanies le peuple palestinien, peuple martyr et force spirituelle de notre temps.

Invoquer Dieu avec ardeur pour qu’Il défasse et brise les ennemis de ce peuple attachés à sa liberté et à la nôtre est un devoir sacré en-deçà duquel nous ne méritons pas le qualificatif d’être humain. Ce qualificatif, beaucoup l’ont perdu depuis octobre 2023 par leur soutien infâme au crime dans sa réalité la plus évidente, la moins ambiguë, au prix de la perte de leur âme. Et rien n’est plus effroyable qu’une âme morte qui ne cesse de mourir sans jamais trouver le repos.

La prière est un lien puissant qui nous rattache au Divin, au Transcendant, au Tout Miséricordieux, le Maître de la Vie et de la mort que les musulmans nomment Allah.

Le devoir des musulmans de France

Les musulmans de France sont eux-aussi appelés à accomplir ce devoir sacré. Les mosquées doivent s’engager pleinement durant ce mois de ramadan dans ce chemin du redressement moral et spirituel de la communauté musulmane française qui ne saurait advenir dans la honte du renoncement à venir en aide à son prochain et a fortiori à son frère en Dieu et en humanité.

Plus que jamais, il est nécessaire que les mosquées jouent leur rôle dans cette composition. Des galas doivent être organisés pour sensibiliser les fidèles sur la double sacralité d’Al Qods (Jérusalem et toute la parcelle palestinienne) et de la vie humaine, toutes deux profanées dans un geste israélien qui confine à l’horreur et au reniement. Des collectes de fonds doivent soulager les douleurs des Palestiniens. Des prières collectives doivent appeler à la libération du peuple palestinien et à la défection de ses bourreaux.

Par extension, les citoyens de toutes confessions se doivent de remplir les rangs des manifestations publiques dénonçant la barbarie israélienne. Ils se doivent pareillement d’écrire à leur député pour les appeler à interpeller le gouvernement sur son soutien objectif au premier génocide de ce siècle.

Ces actions ne trouvent leur force que dans la sincérité. « Garde-toi de négliger le droit de ton frère en t’abritant derrière la fraternité, car il n’est pas ton frère celui dont tu as lésé le droit », disait Ali.

La peur ne doit plus gouverner le cœur des musulmans. Cela est indigne d’eux et de ce qu’eux le monde attend d’eux. Les héritiers du message du Prophète ont à charge de se montrer digne de ce message et non de l’occulter. Ils ne doivent plus craindre de dire la vérité car la vérité est ce qui les nourrit. « Ne dis que la vérité même si elle t’assujettit à la mort », témoignait Omar.

Que les responsables de mosquées et les imams ne craignent plus les persécutions politiques des préfectures. Défendre la sacralité d’Al Qods, troisième lieu saint de l’islam, et la vie de ses habitants est un sacro-saint devoir religieux. Ne pas accomplir ce devoir est un sacrilège et toute entrave politique à l’exercice de ce devoir relève de l’arbitraire et de la violation de la liberté de conscience. Si les responsables de mosquées n’ont plus le courage ou la force d’accomplir les prescriptions de leur religion, qu’ils laissent alors leur place aux valeureux de cette communauté. Ils sont nombreux.

Chaque jour de Ramadan qui passe marque une nouvelle étape dans cette ascension spirituelle vers la libération. Dans cette victoire qu’il nous reste à construire, la prière est un élément essentiel car il n’est pas de victoire réelle qui ne soit précédée d’une victoire spirituelle sur son âme. A nous de la bâtir sans plus tarder !

Fouad Bahri

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