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Voile dans le sport amateur : une loi qui cristallise les tensions

Voile dans le sport amateur : une loi qui cristallise les tensions

Dans l’équipe de rugby de Saint-Denis, la moitié des joueuses portent une cagoule sportive pendant les entraînements et les matchs, malgré l’interdiction prononcée cet été par la Fédération française de rugby contre « tout signe ou tenue manifestant ostensiblement une appartenance religieuse ». Un règlement anti-voile encore peu appliqué, mais qui pourrait devenir contraignant avec le débat parlementaire en cours.

Fazla et Camissa, 18 ans et rugbymen depuis trois ans, s’indignent : « Vraiment, ça nous touche que nous, on nous vise comme ça, à nous attaquer sans raison, parce qu’en soi, ça dérange vraiment personne », confie Fazla. « J’ai l’impression qu’on est la seule religion qui est pointée du doigt à chaque fois », ajoute Camissa, soulignant que d’autres joueurs arborent des symboles chrétiens sans susciter de controverse, à la différence du voile.

Une loi discriminatoire

Pour ces jeunes femmes et plusieurs dirigeants de clubs interrogés, la « Proposition de loi visant à assurer le respect du principe de laïcité dans le sport » vise explicitement les musulmanes. Une autre joueuse de 18 ans exprime sa colère : « Les lois de 1905 sur la laïcité étaient censées nous libérer, pas nous opprimer. Là, on veut m’empêcher de faire du sport juste parce que je suis voilée. »

Elle poursuit, amère : « Dans certains pays, on interdit aux femmes de chanter. En France, on veut leur interdire le sport. Pour un pays qui se dit libre, c’est hypocrite. »

Les défenseurs du texte invoquent la lutte contre le « séparatisme », arguant que les terrains de sport ne doivent pas devenir « de nouveaux espaces d’expression du séparatisme », selon François-Noël Buffet, ministre soutenant la proposition au Sénat.

L’incompréhension des joueuses

Pourtant, ces joueuses affirment que le rugby les ouvre aux autres. « Ça nous a permis de découvrir d’autres personnes sans se poser la question de la religion », explique Fazla. « Le rugby, ça ouvre sur le monde, ce n’est pas communautaire comme on voudrait nous le faire croire », renchérit Camissa.

Au lycée, ces jeunes femmes enlèvent leur voile, conformément à la loi. Mais sur un terrain de rugby, la donne est différente. « On vient pour décompresser. On ne peut pas mettre de côté notre religion pour le sport », insiste Fazla. L’une de leurs coéquipières va plus loin : « Je suis Française, je me plie à la loi à l’école. Mais pour le rugby, je ne l’accepterai pas. Je fais assez de sacrifices pour la République, mais elle n’en fait pas pour moi. »

En cas d’interdiction, elles envisagent soit d’arrêter le rugby, soit de contourner la règle, comme certaines joueuses d’élite, en portant un casque dissimulant leur voile.

Le soutien des clubs

Les dirigeants de clubs, comme Olivier Glévéo, président de Saint-Denis Rugby 93, soutiennent leurs joueuses : « On veut qu’elles continuent. Venir jouer au rugby dans les cités, pour des jeunes femmes, c’est un cap. Elles l’ont franchi, et on veut que ça dure. » Il rappelle qu’aucune réclamation n’a été formulée par les arbitres ou les clubs adverses. Pour lui, ces filles sont avant tout des sportives « rapides, véloces, intelligentes » – bien loin des polémiques qui les visent.

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