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Yannis Mahil : Malikah Shabazz «a œuvré pour l’unité» des afro-américains !

La mort de la fille de Malcolm X, Malikah Shabazz, lundi dans son appartement a endeuillé la communauté afro-américaine. Docteur en islamologie, Yannis Mahil lui rend un ultime hommage dans une chronique que publie Mizane.info.

Alors que Malikah Shabazz était encore dans le ventre de sa mère Betty avec sa sœur jumelle Malak, elle assiste de manière indirecte à l’assassinat de son père, Malcolm X, le 21 février 1965 dans la salle du Audubon Ballroom à Harlem. Même si elle était encore dans son ventre, le choc ressenti par sa mère ce jour-là a certainement marqué cet être en devenir et inscrit sa vie dans un cycle de lutte.

Née le 30 septembre 1965, quelques minutes avant sa sœur Malaak, sa mère Betty l’a directement inscrite dans l’héritage d’El hadj Malik El Shabazz en lui donnant la version féminine de son prénom musulman. En plus de son nom Malikah, elle a reçu, tout comme sa sœur jumelle, le nom « Saban » en hommage à l’ami saoudien de Malcolm X nommé Muhammad Suroor Sabban, qui était à l’époque secrétaire général de la Ligue Islamique Mondiale et qui avait beaucoup soutenu El hadj Malik El Shabazz.

Le racisme est le problème pressant auquel l’Amérique est confrontée

Dans les années 1990, Malikah a été très active dans la vie publique pour honorer l’héritage de son père, non seulement en préservant la mémoire de Malcolm X mais aussi en promouvant ses valeurs et ses luttes. Elle a ainsi fait de nombreuses conférences avec plusieurs organisations et universités sur divers sujets tels que le racisme, le multiculturalisme, les questions afro-américaines, l’éducation, la justice, la jeunesse et beaucoup d’autres, en plus du sujet de Malcolm X.

Yannis Mahil avec Ilyasah Shabazz, la fille de Malcolm X.

Malikah Shabazz considérait que l’éducation multiculturelle qui enseigne le respect des différences était un moyen important pour éliminer le racisme, en ajoutant qu’il existait encore un eurocentrisme qui infériorisait certaines cultures, et qu’il était absolument nécessaire d’aller au-delà de cet état d’esprit. Elle a également rappelé lors d’une conférence à l’Université de West Florida en 1993 qu’il était nécessaire « d’étudier son histoire : le racisme est le problème pressant auquel l’Amérique est confrontée, sans parler du reste du monde », ajoutant que « le racisme est une atteinte à la dignité humaine ». « Nous souffrons tous d’une oppression résultant de la structure internationale du pouvoir blanc, qui est basée en Grande-Bretagne, à Londres, Paris, Washington D. C et ainsi de suite », avait-elle déclarée.

Les médias ont fait croire aux gens qu’ils devaient choisir entre l’un ou l’autre (Malcolm X ou King)

L’éducation de la jeunesse, en particulier afro-américaine, était aussi au cœur de ses préoccupations « Les jeunes sont les sauveurs de l’avenir. Vous avez la grande responsabilité d’apprendre l’histoire des noirs pour créer une nouvelle fondation incassable, un plan révolutionnaire pour l’avenir ».

Consciente de certains abus dans l’usage de l’héritage de son père, elle n’a pas hésité à dire « À une époque, les médias ont fait de lui un raciste violent, un fou plein de haine… Et maintenant je peux marcher n’importe où et voir une casquette Malcolm X être vendu. Ces choses sont vendus par des gens qui n’embrasseraient pas ouvertement mon père, mais qui vont gagner un dollar de lui ».

Son dévouement à soutenir les droits des Noirs l’a amenée à créer en 1990 une organisation pour les étudiants d’ascendance africaine, « l’Organisation nationale des étudiants africains en Amérique », dont la mission était de fournir des services d’encadrement et de soutien aux étudiants de lycée et d’universités pour les préparer à vivre dans une société multiculturelle.

Selon une source, l’organisation comptait 600 membres en juillet 1992. Malikah Shabazz a également œuvré à promouvoir l’unité au sein de sa communauté. Invitée à parler lors d’un événement célébrant la mémoire de Martin Luther King, elle a affirmé que « les médias ont fait croire aux gens qu’ils devaient choisir entre l’un ou l’autre (Malcolm X ou King). Ce n’est pas vrai, vous pouvez aimer les deux ; avoir les deux ».

Malcolm X : « Je suis pour la vérité, peu importe qui la dit. Je suis pour la justice, peu importe pour ou contre qui. »

Son amour et sa reconnaissance envers ses parents et ce qu’ils lui ont donné étaient au cœur de l’engagement de Malikah « Je considère toujours mes parents quand je fais ce que je fais. C’est grâce à mes parents que je suis qui je suis », a-t-elle dit lors d’une conférence en 1992 à Indianapolis.

Cet amour pour sa mère l’amena même à appeler sa propre fille Bettie Bahiyah pour lui rendre hommage, Bahiya étant le nom musulman de Betty Shabazz. Alors qu’elle donnait une conférence au College of New Rochelle en 1993, dans le cadre du black history month, une jeune femme lui demanda « Quelles sont les choses pour lesquels vous voudriez qu’on se rappelle de votre père ? », et Malikah lui a répondu « Il vous aimait tellement qu’il est mort pour vous, c’est une chose que les gens ne comprennent plus ». Ce qui témoigne non seulement de sa révérence pour son père, mais aussi de sa compréhension profonde du message de ce dernier, à savoir l’amour des siens et non la haine des autres.

Au début des années 90, elle n’a pas hésité à dénoncer la politique étrangère de son pays en critiquant la guerre en Irak, en bonne héritière de Malcolm X et de son engagement anti-impérialiste. Et la liste des contributions de Malikah Shabazz est encore longue. Son dévouement à servir Dieu et les hommes, à promouvoir la justice et la paix, à honorer l’héritage de Malcolm X et du Dr Betty Shabazz, mais aussi à promouvoir sa propre vision et sa personnalité, souligne la qualité de ce que fut son engagement.

Le décès de Malikah le 22 novembre est une nouvelle épreuve pour la famille Shabazz et une grande perte pour les Afro-Américains, la communauté musulmane, et au-delà, pour tous les êtres humains qui veulent mettre fin à l’oppression et promouvoir la justice. Comme l’a dit Malcolm X « Je suis pour la vérité, peu importe qui la dit. Je suis pour la justice, peu importe pour ou contre qui. Je suis un être humain, avant tout, et en tant que tel, je suis pour qui et ce qui profite à l’humanité tout entière ».

Yannis Mahil

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